Reconnaissance du génocide arménien par la Syrie: un pavé dans le jardin turc

Le Parlement syrien a reconnu et condamné le génocide arménien jeudi 13 février. Un million 500.000 d'Arméniens avaient été massacrés par l’empire ottoman entre 1915 et 1917. Une décision symbolique qui intervient sur fond de vives tensions entre la Syrie et la Turquie.

Les armées des deux pays se sont affrontées à plusieurs reprises ces derniers jours et le président turc Recep Tayyip Erdogan a menacé de « frapper partout » le régime syrien en cas de nouvelle attaque.

Selon Michel Duclos, conseiller spécial à l’institut Montaigne et ancien ambassadeur de France en Syrie, à travers cette reconnaissance du génocide arménien, Damas cherche à défier Ankara. Cette reconnaissance est « un élément de plus dans l’actuelle confrontation, qui monte en puissance, entre la Turquie et Damas .» 

Selon Michel Duclos, « c’est une façon pour le régime de Bachar el-Assad de rompre, de brûler les ponts avec la Turquie, parce qu’il sait très bien qu’Erdogan va le prendre très mal », dans un contexte de « confrontation de plus en plus forte ».

Cette reconnaissance est « un défi qui participe de l’opération actuelle, où chacun montre ses muscles et cherche à imposer sa volonté à l’autre. C’est aussi une façon de couper court à une possibilité ultérieure de compromis ».

Jusqu’où peut aller cette confrontation entre Damas et Ankara ?

Le régime syrien souhaite certainement aller jusqu’au bout de cette confrontation, poursuit Michel Duclos, « parce que, pour lui, c’est une question de relégitimisation. Il faut qu’il montre qu’il est capable de reconquérir l’ensemble du territoire. Je crois aussi que, s’il réussit remettre la main sur Idleb, l’idée est qu’un jour ou l’autre, les autres territoires que détiennent les Turcs plus à l’est vont également tomber. »

Michel Duclos insiste sur la « détermination très forte » de Damas. « Même détermination du côté turc, mais avec ce handicap que les Turcs, s’ils peuvent envoyer des blindés, des troupes - ce qu’ils ne manquent pas de faire -, ils n’ont pas le contrôle de l’espace (aérien), puisque ce sont les Russes qui (le) contrôlent.»

La Turquie est de ce fait privée d'appui aérien pour ses troupes au sol. Cette maîtrise de l'espace fait que « les Russes restent l’arbitre de cette confrontation », conclut Michel Duclos.

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