Yémen: à Sanaa, la vie suit son cours malgré 5 années de guerre

Il y a 5 ans jour pour jour les rebelles houthis prenaient le contrôle de Sanaa, la capitale du Yémen. Depuis, le conflit dans le pays a été influencé par différents acteurs étrangers dont l'Iran, l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Les habitants de la capitale vivent pris au piège au milieu cette guerre aux dimensions internationales.

Malgré les longues années de guerre, Shams Shamsan raconte une population volontaire qui tente de survivre et de faire entendre sa voix par-dessus le bruit des bombardements.

« Il y a de nombreuses initiatives communautaires menées notamment par les jeunes. Ils essaient de résoudre les problèmes du quotidien, dégager des rues, distribuer de l’aide, de la nourriture ou des médicaments. Ils essaient de réunir de l'argent pour aider les familles. Mais ces initiatives n'existent pratiquement plus car les autorités houthies y ont mis fin en imposant des permis », renseigne la chercheuse yéménite basée à Sanaa.

« Nous demandons la levée du blocus économique »

Les déplacements sont devenus extrêmement compliqués avec la multiplication des check-points tenus par différentes milices. Au-delà des obstacles les plus évidents, l'écroulement de l'économie du pays est également au cœur de la souffrance des Yéménites, selon Shams Shamsan.

« A Sanaa, les fonctionnaires ne sont plus payés. L'effondrement économique a détruit les Yéménites. Parce que ça veut dire que la guerre toque à toutes les portes. Ce n'est plus seulement des avions qui nous bombardent mais ils prennent tout ce que nous avons, le salaire qui nourrit notre famille. Ça veut dire la faim, ça change les dynamiques domestiques et ça fait naître plus de violence au sein de la société. Ce que nous demandons avant tout, c'est la levée du blocus, le blocus économique sur le Yémen. »

Le blocus imposé par l'Arabie saoudite est censé empêcher l'armement des rebelles Houthis. Shams Shamsan et ses collègues chercheurs du Sanaa Center dénoncent une pénurie de nourriture, des manques au quotidien, alors que les armes, elles, ne font que se multiplier.


■ La très convoitée Hadramaout, la région du pétrole

Mohammed al-Khateri vient de la région d'Hadramaout, 35% du territoire yéménite, à l'est du pays. C'est de là qu’est extraite la grande majorité du pétrole et du gaz du pays. C'est aussi une région convoitée par les groupes terroristes.

« Entre 2015 et 2016, les habitants de Hadramaout sont arrivés à chasser les jihadistes d'al-Qaïda et de Daesh, notamment de la ville portuaire de Mukalla, avec l'aide de la coalition arabe. Mais ils n'ont pas reçu suffisamment d'aide et continuent d'être négligés. »

Ces dernières années, la coalition arabe s'est principalement concentrée sur sa lutte les rebelles houthis. Mohammed al-Khaetri raconte une population abandonnée à la plus grande pauvreté, assise pourtant sur la fortune du Yémen. Une proie facile pour les organisations terroristes.

« Aujourd'hui al-Qaïda et Daesh bénéficient d'une sorte de repos. Ils sont dans la montagne en train de regarder ce qu'il se passe et ils préparent leur coup pour le futur. Ce qui me fait peur, c'est que si l'État finit par s'effondrer ou si les forces émiriennes et saoudiennes partent de manière soudaine, le vide sera rempli par al-Qaïda et Daesh. Moi, je sais que je serai enterré, mais vous, les Occidentaux serez aussi impactés par la hausse du prix du pétrole et même vos tasses de cafés coûteront 50 euros. »

En plus d'être riche en pétrole, le gouvernorat d'Hadramaout est en effet connecté au golfe d'Aden, lieu de passage pour le commerce maritime international.

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