Frontière jordanienne: les réfugiés syriens bloqués dans le désert ont faim

Le Programme alimentaire mondial (PAM) autorise enfin la livraison de nourriture aux plus de 75 000 Syriens bloqués à la frontière jordanienne. Le royaume hachémite a fermé ses frontières le 21 juin après une attaque à la voiture piégée sur ses garde-frontières depuis l'un des camps où vivent ces déplacés. Toute la zone frontière est désormais zone militaire interdite aux ONG. Le PAM vient de livrer 3 semaines de nourriture pour 75 000 personnes. Une livraison unique semble-t-il, mais les conditions dans ces deux camps de fortune restent terribles.

Pour faire parvenir cette aide humanitaire, l'Onu a dû recourir à des méthodes inédites, en utilisant des grues et des drones de surveillance comme l'explique Majid Yahia, responsable du Programme alimentaire mondial pour la Jordanie à RFI. « Le programme alimentaire mondial distribuait de la nourriture depuis le mois de mai. Mais depuis l'attentat suicide qui a eu lieu sur la frontière, le gouvernement jordanien interdit aux réfugiés de passer. Alors nous avons du trouver une solution, et c'était d'autant plus difficile que les autorités jordaniennes ne nous ont accordé que trois jours pour faire la distribution. Il fallait aussi prendre en compte le terrain : depuis l'attentat, les Jordaniens ont installé des barbelés, en plus de la barrière de sable qui a été érigée à la frontière.

Une grue au dessus de la frontière

Au début nous pensions que les chefs de tribus pouvaient prendre en charge les rations alimentaires avec l'aide de porteurs, poursuit Majid Yahia, mais le temps qui nous était imparti était beaucoup trop limité étant donné le poids et la quantité de l'aide. Alors nous avons eu cette idée : utiliser une grue pour faire passer l'aide au dessus de la fronitère. On a utilisé ce système, et avec des drones guidés par les Jordaniens nous avons pu surveiller, à distance la distribution ».

Les deux camps concernés sont situés dans une zone totalement désertique, sans villages ou points d'eau, rapporte notre correspondante à Amman, Angélique Ferat. Les rares témoignages qui ont pu filtrer racontent la chaleur terrible, le manque d'eau et de nourriture, la faim qui les tenaille tous, le nombre de malades qui s'accroît chaque jour. L'Unicef a réussi à maintenir une livraison d'eau tous les deux ou trois jours d'eau mais personne d'autre n'a été autorisé à passer cette frontière.

Selon des vidéos et des messages qui arrivent à sortir. Des enfants et des personnes âgées sont morts de malnutrition. Des femmes enceintes sont mortes en couche. L'ONG Médecins sans frontières qui travaillait dans cette zone avait répertorié 500 femmes enceintes. Des Syriens viennent vendre à prix d'or quelques légumes ou du riz mais la plupart des déplacés sont trop pauvres pour acheter quoi que ce soit. Ils ont fui l'est de la Syrie, Deir Ezzor ou Palmyre, ont fait des centaines de kilomètres avant de se retrouver coincés en plein désert.

Aujourdhui plus de 75 000 personnes sont amassées à la frontière jordanienne sous des tentes faites de bric et de broc. 75 000 personnes, c'est autant que le camp de réfugiés syriens de Zaatari situé en Jordanie, et qui est considéré comme l'un des plus grands camps du monde. Selon le Haut commissariat aux réfugiés, quelque 600 000 Syriens ont trouvé refuge sur le territoire jordanien. La Jordanie a complètement fermé ses frontières avec la Syrie, à la suite d’une attaque avec une voiture chargée d’explosif qui a tué sept garde-frontières et policiers à l’est du pays en juin dernier.

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