Avec notre correspondante à Beyrouth, Laure Stephan
■ Obsèques en grande pompe dans la Dahiyeh, banlieue sud de Beyrouth
C’est lors des funérailles que Naïm Qassem, numéro deux du Hezbollah, a indiqué que les résultats de l’enquête menée par le parti pour déterminer les circonstances de la mort de Mustapha Badreddine vont être rendus publics dans les prochaines heures.
Moustapha Badreddine dirigeait les opérations en Syrie du mouvement chiite libanais, engagé dans la guerre aux côtés de Bachar Al-Assad.
→ A (RE)LIRE : Syrie: Mustapha Baddredine, chef militaire du Hezbollah tué à Damas
Dans la banlieue sud de Beyrouth, où se trouve le commandement du Hezbollah, de nombreux portraits du chef militaire ont été accrochés sur les murs. L’après-midi, une foule de milliers de Libanais partisans du Hezbollah ont participé aux funérailles de Mustapha Badreddine. « Ce chef militaire défendait la ligne de la résistance c’est-à-dire de la lutte contre Israël mené par le Hezbollah », a déclaré un homme dans le cortège.
Son cercueil a été recouvert d’un immense drapeau jaune, celui de son parti. Des hymnes du Hezbollah ainsi que des chants religieux ont été scandés dans les rues de la capitale libanaise.
Des tirs nourris ont été retentis en forme d’hommage à celui qui était la bête noire des Américains, convaincus qu’il avait participé à plusieurs attentats.
■ Israël, derrière l'assassinat ?
Pour le partisan comme pour d’autres personnes, les Israéliens seraient responsables de l’attaque de la base militaire du Hezbollah près de Damas où se serait trouvé le commandant.
Il n'y a pas eu de réactions officielles en Israël à la mort du commandant. La Jérusalem, on garde le profil bas sur sur cette mort, rapporte notre correspondant sur place, Michel Paul. Un ministre interrogé sur les ondes de la radio publique israélienne a tout simplement refusé de répondre aux questions sur cette affaire.
L'élimination de Mustapha Badreddine fait la une de toutes les médias, sans pour autant qu'il y ait, là non plus, d'informations disant qu'Israël. Bien au contraire. Les chroniqueurs militaires soulignent que tous les signes semblent démontrer qu'Israël n'est pas impliqué. Les responsables militaires et civils qui sont cités se gardent bien de tout commentaire pouvant lier Israël à la mort du chef de l'aile militaire du Hezbollah.
Yaakov Amidror, un général de réserve et ancien conseiller militaire de Benyamin Netanyahu, affirme que quelque soit le responsable, la mort du chef militaire de l'organisation est une bonne nouvelle pour Israël. Son prédécesseur Imad Moughnieh avait lui-même été tué, en 2008, dans une banlieue de Damas par l'explosion d'un repose-tête piégé dans sa jeep. Là non plus, l'assassinat n'avait jamais été revendiqué. Même si les soupçons portaient sur Israël.
En tout cas, on souligne que la mort du chef militaire du Hezbollah risque de réchauffer la situation et de provoquer de nouveaux actes de violence.
■ Accusé par le Tribunal spécial pour le Liban
Badreddine était par ailleurs jugé par contumace par le Tribunal spécial pour le Liban pour le meurtre de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, le 14 février 2005.
La Syrie de Bachar el-Assad a souvent été montrée du doigt après l'assassinat de Rafic Hariri. L'acte d'accusation du Tribunal spécial pour le Liban ne concerne que cinq auteurs présumés. Des membres du Hezbollah, parmi lesquels Mustapha Badreddine, possible cerveau de l'opération.
Avocat franco-libanais, Me Antoine Korkmaz avait été commis d'office pour défendre Mustapha Badreddine. Il explique : « Le procureur l'accuse d'avoir été à la tête de la conception du prétendu assassinat contre M. Hariri. Il considère que le jour de l'attentat ou les quelques semaines avant, il se trouvait à un endroit qui laisserait croire qu'il était en contact avec d'autres personnes qui l'ont perpétré cet attentat. »
Maitre Korkmaz n'a jamais rencontré l'accusé qu'il défendait. Avec la mort de son client, les poursuites vont s'interrompre, selon son avocat : « Bien sûr qu'il y a une frustration, parce que ça fait des mois et des mois que je travaille avec mon équipe dans la préparation de la défense. Nous avions la certitude, et nous l'avons toujours, que M. Baddredine n'avait strictement rien à voir avec cet attentat. »
Comme Badreddine, les quatre autres membres du Hezbollah poursuivis par le TSL sont jugés par contumace. Ils font l'objet de mandats d'arrêt internationaux.