Avec notre correspondante à Jérusalem, Murielle Paradon
Pour la première fois depuis la montée des tensions, début octobre, les violences se sont étendues ce vendredi à la bande de Gaza. Six jeunes Palestiniens ont été tués et 80 autres blessés par des soldats israéliens lors de manifestations près de la barrière de sécurité avec Israël.
Des centaines de jeunes Palestiniens avaient décidé de manifester en soutien aux événements en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Ils sont descendus dans les rues près de Khan Younes et de Gaza.
Certains se sont approchés de la barrière de sécurité avec Israël, jetant des pierres sur les soldats, selon l’armée israélienne, qui a répliqué en tirant. Le bilan est lourd, c’est le plus important depuis la guerre à Gaza de l’été 2014.
L'appel du Hamas « renforcer l'intifada » relayé à Jérusalem
Le Territoire palestinien était jusqu’ici resté à l’écart des violences qui touchent la Cisjordanie, Israël et Jérusalem depuis une semaine. Mais ce vendredi le chef du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh, a estimé que l’on était désormais entré dans une nouvelle intifada, après les soulèvements de 1987 et 2000. « Nous appelons à renforcer et accentuer l'intifada (...). La bande de Gaza remplira son rôle, elle est prête à l'affrontement », a-t-il lancé dans un discours.
Un appel relayé à Jérusalem par un imam radical. Ce vendredi, plusieurs centaines de jeunes Palestiniens ont prié dans la rue devant la vieille ville de Jérusalem, face à un barrage de policiers israéliens. L’accès à l’Esplanade des mosquées leur est interdit. Dans son prêche l’imam radical interpelle les jeunes : « Qui est prêt à mourir pour l’Esplanade des mosquées ? » Tous répondent par l’affirmative.
« L’Esplanade des mosquées n’appartient qu’aux musulmans. S’il faut la protéger dans le sang, on le fera. Il y avait les croisades avant ici. Il y a eu plusieurs colonisations. Toutes ont disparu, les Israéliens vont partir aussi », assure Soheib, 24 ans, qui se dit prêt à la lutte armée. Pour lui, la voie du dialogue, la désescalade prônée par Mahmoud Abbas, n’est pas la bonne. « Abbas n’a pas le courage de s’élever contre les Israéliens. Ce n’est pas un président. On n’a pas de président pour l’instant, mais on a la résistance. »
A la fin de la prière, le face-à-face s’est tendu entre jeunes Palestiniens et policiers israéliens. Ils se toisent longuement, mais aucun affrontement n’a eu lieu. Chacun est reparti chez soi, jusqu’à la prochaine confrontation.
Rassemblement de colons dans la vieille ville de Jérusalem
Plus tôt dans la journée, en plein quartier musulman de la vieille ville, des colons israéliens rassemblés à l’extérieur de chez eux sous haute protection ont rendu un hommage aux victimes juives des attaques à l’arme blanche. Un hommage, mais aussi une volonté de montrer aux habitants du quartier, les Palestiniens, qu’ils sont là et qu’ils ont bien l’intention d’y rester.
« Le terrorisme et la violence sont faits pour vous faire partir. Et les Arabes pensent qu’ils vont gagner comme ça. Mais les agressions et la violence ne fonctionnent pas sur le peuple juif. Ça le rend plus fort, plus résolu. Et avec l’aide de Dieu, d’autres familles juives viendront s’installer dans le quartier », lance Daniel Lioure, président d’une organisation de colons.
Mohammed, un commerçant palestinien, observe la scène, dépité. Il est né ici, dans la vieille ville, il y habite et y travaille. « Ce que vous voyez n’est pas normal. Tous ces colons, ces policiers partout, à chaque coin de rue. Ils embêtent les Palestiniens. Ils ne nous laissent pas travailler normalement. Les policiers sont même plus nombreux que les gens », s’emporte-t-il. « Normalement cette rue est remplie de Palestiniens, mais à cause de toute cette sécurité, ils ne peuvent pas venir et accéder à la Mosquée Al Aqsa. C’est dur. »
Palestiniens et colons israéliens s’observent, dans une ambiance délétère. Les regards qui s’échangent dans la vieille ville de Jérusalem en disent long.