de notre correspondante à Riyad,
C’est indéniablement un événement sans précédent dans le royaume saoudien. L’Arabie saoudite est en train de vivre un véritable séisme socio-culturel. ll s'agit d'un rêve devenu réalité pour toutes ces femmes qui avaient été exclues des deux précédentes élections municipales en 2005 et 2011 : pendant trois mois, jusqu’à fin novembre, candidates et candidats vont s’affronter sur le terrain de la politique. Il faut savoir que dans ce pays, de nombreux Saoudiens sont déçus des promesses non tenues par les conseillers municipaux élus. Ces mêmes Saoudiens avouent qu’ils pourraient voter pour des femmes, selon eux plus sérieuses et plus fiables.
De leur côté, les Saoudiennes les plus motivées ont même participé, ces derniers mois dans tout le royaume, à des stages de formation relatifs à la vie politique. Des sessions organisées et encadrées par des femmes, des juristes ; mais au-delà de la solidarité féminine, il s’agissait pour les candidates potentielles de se préparer au mieux et de présenter un dossier irréprochable. Ces femmes battantes, courageuses, soutenues par leur tuteur masculin, sont souvent décriées par une frange de la société, les conservateurs en particulier. Elles n’ont donc pas droit à l’erreur.
Une souplesse du roi Salman ?
Si l’on revient à la genèse, c’est en réalité feu le roi Abdallah qui a annoncé la participation des femmes, le 25 septembre 2011. En plein cœur du Printemps arabe, cette décision avait eu l’effet d’une bombe dans le royaume. Il ne faut pas oublier que l’ancien souverain tenait à ce que les femmes occupent une place importante dans la société active. A son initiative, 30 femmes avaient été nommées au Majliss al-Shoura, le conseil consultatif, en janvier 2013. Elles avaient ensuite été autorisées à être vendeuses ou caissières dans les magasins. Ces réformes, à ce moment-là, constituaient des décisions sans précédent, historiques et qui bousculaient le Landerneau des religieux.
En ce qui concerne le droit de vote ou le droit d’éligibilité, accordés aux Saoudiennes, le roi Salman s’est engagé le premier jour de sa montée sur le trône à poursuivre la politique menée par son demi-frère. Ces élections municipales ouvertes aux femmes sont la preuve concrète que les choses bougent. Certes, lentement… même si la route des réformes en matière des droits de la femme demeure, encore longue et sinueuse.
Réformes à venir ?
Les Saoudiennes ne veulent pas brûler les étapes ou obtenir des droits dans la précipitation. Elles auraient trop peur que ces droits soient remis en question et bafoués. Mais bien sûr, elles espèrent au plus profond d’elles-mêmes que cette participation aux élections municipales entraînera d’autres réformes.
Elles voudraient avant tout se débarrasser du tutorat auquel elles sont inféodées, avant même d’obtenir le droit de conduire. Malgré la participation d’à peine soixante-dix femmes, ces élections sont d’ores et déjà une petite victoire pour toutes ces Saoudiennes, ces pionnières de la politique en Arabie saoudite.