Le Liban, dommage collatéral du conflit syrien

Le Liban est touché de plein fouet par la guerre en Syrie. Et la présence d'1,2 million de réfugiés syriens, soit le tiers de sa population, n'est pas le seul problème qui affecte le pays du Cèdre. Le Liban doit aussi faire face à des attaques jihadistes.

Avec notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh

Les jihadistes déploient quelque 3 000 combattants dans une zone de 500 kilomètres carrés, soit 5% de sa superficie, à la frontière libano-syrienne, à l'Est. Le groupe Etat islamique et le Front al-Nosra, la branche syrienne d'al-Qaïda se partagent le contrôle de cette région montagneuse, qui culmine à 2 700 mètres d'altitude.

Face à eux, l'armée libanaise déploie 5 000 hommes, appuyés par des blindés, l'artillerie et des hélicoptères de combat. Des centaines de combattants du Hezbollah et des groupes paramilitaires, composés essentiellement d'habitants des villages, participent aussi à la défense de la région.

Ce front est en activité permanente. Les jihadistes y mènent des attaques contre les positions de l'armée pour dégager leurs lignes de ravitaillement et tenter de prendre des localités libanaises. Depuis août 2014, l'armée a perdu une soixantaine d'hommes et des dizaines de blessés dans les combats contre les extrémistes.

Elle a reçu d'importantes quantités d'armes fournies par les Etats-Unis et attend, en avril, la mise à exécution d'un contrat de 3 milliards de dollars d'armes françaises, payées par l'Arabie saoudite.

Un poids économique

La crise syrienne a eu aussi des répercussions négatives sur l'économie libanaise. Le secteur bancaire a en effet subi les effets de la guerre dès le début de la crise. Les banques libanaises ont été les premiers établissements étrangers à s'installer en Syrie dès la libéralisation de ce secteur par Damas, en l'an 2000. Les six banques présentes en Syrie ont réduit leurs activités à cause des sanctions internationales et ont enregistré d'importantes pertes.

Ce n'est pas tout. La Syrie constitue la porte du Liban vers le monde arabe. Beyrouth était un port de débarquement de marchandises, transportées par voie terrestre vers les pays du Golfe et l'Irak. Depuis le début de la guerre, et la fermeture de cette porte, l'activité de transit a considérablement baissé.

Un flôt ininterrompu de réfugiés

Dès le début de la guerre civile, il y a quatre ans, le Liban voisin a vu arriver des vagues de réfugiés syriens. Cet afflux met à rude épreuve l'économie du pays et la cohabitation entre Libanais et réfugiés, comme en témoigne sur RFI, soeur Hanan Youssef qui dirige un dispensaire à Beyrouth qui accueille 150 réfugiés par jours : « On est passé de 200 000 réfugiés en 2011 à un million et demi depuis 2015. [C’est] comme si la France avait accueilli 18 millions en plus tout de suite. [...] On reçoit beaucoup de personnes traumatisées, c’est-à-dire des femmes qui ont été violées, des filles qui ont été violées, des enfants qui ont porté des armes. En plus, c’est un pays qui a une infrastructure très abîmée par la guerre, des hôpitaux très primaires et des écoles gouvernementales qui coulent complètement. »

Le dialogue entre Libanais et réfugiés est ainsi mis à rude épreuve, affirme la religieuse : « Les réfugiés qui viennent prennent un peu les petits travaux des Libanais, ce qui fait que le taux de chômage est beaucoup plus élevé. Et ils [les Libanais] ne perdent pas seulement leur métier, ils perdent aussi leur maison parce que les maisons sont louées à des familles syriennes. Trois, quatre familles partagent la même maison. Il y a beaucoup de conflits qui entre la population libanaise et les réfugiés syriens parce que la population libanaise est vulnérable. » Et soeur Hanan Youssef d'avertir que si la communauté internationale n'aide pas plus le Liban, le pays va littéralement « couler ».

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