Liban: une frontière de plus en plus étanche pour les Syriens

Depuis lundi, l’entrée des Syriens au Liban est soumise à de nouvelles restrictions : ils doivent justifier des raisons de leur séjour. Des mesures qui s'apparentent à un visa, même si officiellement, celui-ci n'est pas requis. Cette procédure est une première dans l'histoire des deux pays, dont les citoyens ont toujours circulé librement. Beyrouth, qui accueille près de 1,2 million de réfugiés, veut diminuer le fardeau qui pèse sur le pays, alors que l'aide internationale se tarit. Le HCR a exhorté l'Europe à faire davantage d'efforts.

Avec notre correspondante à Beyrouth, Laure Stephan

Frontière syro-libanaise de Masnaa. Dans un froid glacial, des Syriens franchissent le dernier barrage des forces de sécurité avant l'entrée au Liban. Des chauffeurs de taxi font le pied de grue, mais les arrivées sont peu nombreuses.

Mohamed, un ouvrier originaire de Damas, est parmi les chanceux autorisés à passer. « J'ai dû remplir un formulaire et justifier que je travaille au Liban, explique-t-il. J'ai demandé si je pouvais faire venir ma famille, qui est à Damas, ils m'ont dit que oui, mais pour une semaine seulement. Le but de ces nouvelles mesures, c'est de stopper les réfugiés. Ils sont nombreux à attendre dans le froid à la frontière, mais ils sont refoulés. »

Selon Hussein, un chauffeur de taxi, le flot des arrivées a déjà diminué depuis plusieurs mois. En octobre, Beyrouth avait annoncé fermer ses portes aux réfugiés, sauf raison humanitaire. Les nouvelles mesures renforcent ces restrictions.

Samira, une Damascène qui voyageait avec sa nièce adolescente, est en colère : « Nous avons passé plus de quatre heures à la frontière, raconte-t-elle, mais ils n'ont pas laissé rentrer ma nièce, elle est repartie avec son père. Au poste-frontière, une femme a présenté sa réservation d'hôtel, mais elle a été refoulée, car elle est Palestinienne. Mais on vit une crise dramatique ! Ceux qui sont autorisés à entrer et n'ont pas de résidence n'obtiennent un permis que pour quelques jours. » 

Le HCR exhorte l'Europe à faire davantage pour aider les réfugiés syriens

Selon le rapport du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) présenté ce mercredi, les Syriens sont devenus à la mi-2014 la deuxième population de réfugiés dans le monde derrière les Palestiniens. Plus de trois millions de personnes ont fui le conflit et ce chiffre risque de dépasser les 4 millions d'ici décembre prochain indique le Haut-commissariat.

Le HCR est venu en aide à 13 millions de personnes l'an dernier, et ce sont les pays en développement qui se trouvent en première ligne, selon William Spindler, le porte-parole du HCR à Genève. Il appelle donc les pays européens à faire davantage d'efforts :  « Il est essentiel que l’on s’attaque aux causes de cette crise humanitaire, c'est-à-dire le conflit lui-même mais aussi que l’on aide les pays qui reçoivent la plupart des réfugiés dans le monde, notamment le Liban, la Jordanie et la Turquie. »

Pour William Spindler, contrairement à ce que l’on pense en Europe, ce ne sont pas les pays développés qui accueillent le plus de réfugiés mais davantage les pays en développement. « L’Europe doit aider, pour une question de solidarité mais aussi pour une question d’intérêts, tous ces pays pour qu’ils puissent continuer à recevoir des réfugiés parce que le coût économique, social et humain de soutien apporté aux réfugiés par tous ces pays est assumé par les communautés qui peuvent le moins se le permettre », estime-t-il.
 

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