Les combattants kurdes irakiens prêts à combattre à Kobane

Arrivés en deux groupes mercredi 29 octobre du Kurdistan du Nord, les 150 peshmergas irakiens envoyés pour lutter contre les islamistes assiégeant la ville kurde syrienne de Kobane sont toujours en attente à la frontière turque. Jeudi, une délégation s’est rendue quelques heures dans la ville pour ce qui ressemble aux tout derniers préparatifs. La situation à la frontière turco-syrienne sera au cœur de l’entretien entre le président turc, en visite ce vendredi à Paris, et François Hollande.

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

Les combats sont toujours aussi féroces sur les fronts Est et Sud de la ville, peut-être plus encore que jamais ces dernières 48 heures, depuis le début de ce mois de siège. Cela s’explique probablement par l’envoi des renforts. L’on comprend mieux les précautions prises par les peshmergas arrivés depuis mercredi à la frontière.

Jeudi 30 octobre, une dizaine de responsables du contingent de 150 peshmergas irakiens, avec casques et gilets pare-balles tout neufs, sont passés à pied à Kobane pour rencontrer les combattants locaux. Cette visite de reconnaissance avait un triple but : assurer une sécurité maximale au transit des armes qui constituent une cible de choix pour les islamistes, repérer la topographie de la ville et la position des différents fronts, et enfin, coordonner à l’avance les actions militaires conjointes ou séparées des combattants kurdes syriens et irakiens.

Les éclaireurs sont rentrés dans la soirée, sans faire aucun commentaire, et maintenant tout semble prêt - à moins que la Turquie ne s’en mêle - pour que les peshmergas se jettent dans la bataille. Le président kurde irakien Massoud Barzani a d’ailleurs dit que si besoin, et si Ankara l’y autorisait, il était prêt à renvoyer plus tard davantage de renforts à Kobane.

Un processus de paix fragilisé en Turquie

Au même moment en Turquie, le processus de paix kurde est sérieusement menacé, après des incidents et des violences répétées ces derniers jours. Il serait même gelé jusqu'à nouvel ordre, rapporte la chaîne d'informations CNN-Türk, qui affirme que le contact du leader du PKK emprisonné, Abdullah Öcalan, a été stoppé. « Nous ne sommes ni condamnés à, ni obligés de poursuivre le processus de paix », a déclaré le vice-Premier ministre Bülent Arinç lundi 27 octobre, évoquant pour la première fois l’éventualité d’un coup d’arrêt, provisoire ou définitif, à ce processus de paix révélé il y a deux ans et officialisé au printemps 2013.

Deux jours auparavant, le 25 octobre, le meurtre de trois militaires, abattus en pleine rue à Yüksekova avait été immédiatement attribué aux « terroristes », terme désignant la rébellion kurde, mais catégoriquement renié par le PKK.

Mercredi, à Diyarbakir, un nouvel assassinat de militaire a sans doute été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, alors que depuis des semaines la tension était vive entre les Kurdes et Ankara sur fond de crise à Kobane.

Selon CNN-Türk, le gouvernement exige le retour au calme dans le pays pour relancer un processus qui, de l’avis de tous, est au point mort. Pour le parti pro-kurde HDP, c’est au contraire l’accélération des négociations qui serait seule à même de rétablir la confiance et le calme, après plusieurs ultimatums du leader historique de la rébellion et de son aile militaire basée en Irak du nord. Réuni durant plus de dix heures jeudi, le Conseil de sécurité nationale a souligné l’importance du retour à l’ordre.


Le président turc en visite en France

Par ailleurs, Recep Tayyip Erdogan, le président turc, est en déplacement à Paris ce vendredi 31 octobre. A l'origine, sa visite à François Hollande devait porter essentiellement sur la candidature d'Ankara à l'Union européenne, mais dans la mesure où la Turquie a entrouvert sa frontière aux renforts venus du Kurdistan irakien, la crise de Kobane devrait dominer ces entretiens.

Toutefois, les Kurdes de Syrie dénoncent un geste insuffisant. En France également, la communauté kurde dénonce la position adoptée par Ankara, et demande à François Hollande de faire pression sur son homologue turc.

De son côté, le Conseil démocratique des Kurdes de France appelle à manifester contre la visite du président turc en France ce vendredi après-midi à Paris.

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