■ Article mis à jour régulièrement avec notre envoyée spéciale à Gaza et notre correspondant à Jérusalem, Muriel Paradon et Michel Paul
Toute la nuit jusqu’à 5 heures du matin environ, des bombardements très réguliers sur la bande de Gaza ont été entendus, dont certains très proches en face du port. Les immeubles ont tremblé. Au moins deux bombes se sont abattues dans un terrain vague, laissant un trou immense.
L’armée israélienne semble viser des points de départ de roquettes ou des caches d’armes. Elle a également ciblé des membres du Hamas et du Jihad islamique. Des chefs ont été tués, ainsi qu’une partie de leurs familles. Il y a des victimes civiles parmi les 43 morts dénombrés depuis lundi.
L’armée israélienne intervient par les airs avec ses avions F16, mais elle lance aussi des missiles depuis les bateaux postés au large de la bande de Gaza - bateaux que l'on peut apercevoir dès que la nuit tombe. Dans la nuit de mardi à mercredi, un missile, vraisemblablement tiré par l'un de ces bateaux, a atteint une cahute en tôle tout prêt du port. L’explosion a fait trembler les immeubles alentours.
La population n’a pas dormi une fois de plus à cause des attaques israéliennes très intenses, et ce qui a changé ce mercredi, c’est la situation dans la rue. La veille, il y avait du monde dans le centre-ville de Gaza, les commerces étaient ouverts, les habitants faisaient leurs courses même s’ils étaient inquiets. Ce mercredi, la ville est déserte ; les gens sont restés cloitrés chez eux de peur d’être touchés par les bombardements.
Le Hamas prêt à tout ?
Le Hamas ne se contente plus de lancer des roquettes sur le sud d’Israël mais aussi vers Tel Aviv et Jérusalem, à une cinquantaine de kilomètres de là. L’armée israélienne a fait état d’un tir de roquettes sur Hadera. C’est une ville située à 100 kilomètres de la bande de Gaza, une distance jamais atteinte par le Hamas depuis sa prise de pouvoir en 2007 dans le territoire palestinien. Deux roquettes ont également été lancées près du site nucléaire de Dimona.
Le Hamas semble donc prêt à tout. Mardi soir, il a même mené une opération secrète par la mer. Plusieurs de ses hommes ont réussi à nager vers une base militaire située en territoire israélien, mais quatre d’entre eux auraient été tués et un soldat israélien légèrement blessé. Les médias israéliens diffusent en boucle un clip vidéo montrant l’élimination des membres du commando. L'armement du Hamas reste bien faible par rapport à celui d'Israël.
En tout début de matinée, cinq roquettes ont été interceptées en plein vol par le système de défense antimissiles « Dôme de fer » dans le secteur de Tel Aviv. C’est la deuxième journée de l’opération « Bordure de protection » après une nuit tendue des deux côtés. Israël a essuyé une véritable pluie de roquettes, notamment de missiles M75 améliorés. Certains ont atteint la ville de Jérusalem et une roquette de fabrication iranienne a touché le nord de la ville de Hadera, à plus de 110 km de la bande de Gaza - sans faire de blessé.
La défense passive a ordonné l’ouverture des abris et a interdit les rassemblements de plus de 300 personnes dans les localités proches de Gaza. L’aviation israélienne, de son côté, a effectué quelque 160 raids.
Vers une offensive terrestre ?
Selon le site internet du quotidien Yediot Aharonot, l’aviation israélienne souffre d’un manque de renseignement sur la position des roquettes de longue portée palestiniennes, contrairement à ce qui s’était produit lors de la précédente opération militaire à Gaza, « Pilier de défense ». De source médicale à Gaza, on indique que les bombardements ont fait 43 morts et 130 blessés.
Le cabinet israélien de sécurité s’est réuni dans la soirée. Benyamin Netanyahu a indiqué que l’opération militaire ne serait pas de courte durée. Les tentatives de médiation n’ont pas été couronnées de succès. Le Hamas a choisi l’escalade, dit-on. « L’organisation a le dos au mur », souligne un commentateur.
Le ministre israélien de la Défense, Moshe Yaalon, a indiqué que l’opération militaire allait s’amplifier dans les prochains jours. Le Premier ministre Benyamin Netanyahu répète pour sa part qu’il a ordonné à l’armée d’aller cette fois jusqu’au bout et a promis d'intensifier les attaques contre le Hamas, principal cible de l'opération. Il y a des sous-entendus mais personne ne parle ouvertement d’offensive terrestre. On se contente de dire qu’il s’agit d’une opération de longue durée, une sorte de guerre d’usure. Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a lui dénoncé « un génocide » d'Israël à Gaza.
Le monde diplomatique réagit
Dès lundi, la Ligue arabe a appelé à la tenue d'une réunion urgente du Conseil de sécurité des Nations unies mais pour l'instant il n’y a eu aucune réaction. Leïla Shahid, ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union européenne, demande à tous les protagonistes d'exercer le maximum de retenue pour éviter de nouvelles pertes civiles et une déstabilisation générale.
Mêmes éléments de langage du coté de l’Egypte qui condamne les tirs de roquettes depuis Gaza contre Israël et appelle les deux camps à « exercer le maximum de retenue », sans laisser espérer une réelle médiation de la part du gouvernement Sissi. Le ton est plus cru de la part de la Jordanie qui a appelé ce mercredi à l'arrêt de « l'agression barbare » israélienne contre la bande de Gaza.
Les Etats-Unis se contente d'appeler Israéliens et Palestiniens à l'apaisement. Le président américain, Barack Obama, a exhorté Israéliens et Palestiniens à ne pas agir par esprit de vengeance. Du côté européen, François Hollande a exprimé à Benyamin Netanyahu « la solidarité de la France face aux tirs de roquettes en provenance de Gaza » et « condamne fermement les agressions » contre Israël. Même son de cloche pour la chancelière allemande, Angela Merkel, qui a condamné « sans réserve » les tirs de roquettes sur Israël.
La Turquie a adopté une position plus critique contre Israël en lui demandant d'arrêter immédiatement ses attaques contre Gaza. Ankara a également interpelé les Nations unies pour que l'organisation mette en garde l'État hébreu afin qu'il abandonne sa politique de « punition collective ».