La campagne électorale iranienne a été dominée par la crise économique du pays et par la critique des politiques qui ont mené à cette crise durant huit années du règne de Mahmoud Ahmadinejad.
Selon l’aveu public des autorités, la pauvreté, l’inflation et le chômage massif ont rendu quasi catastrophique la situation économique de l’Iran. D’après elles, celle-ci a pour origine, d’une part, la politique économique de Mahmoud Ahmadinejad, basée sur l’importation de centaines de milliards d’euros de produits de consommation, et, d’autre part, les sanctions internationales contre le pétrole et le système bancaire iranien ayant asphyxié le pays.
Or pour le régime iranien, outre Ahmadinejad, les sanctions internationales ont pavé le chemin d’une explosion sociale dans une société où l’inflation officielle tourne autour de 32%, où la monnaie nationale a perdu plus de 70% de sa valeur, où plus de 50% des entreprises ont fermé leur porte et où 50% de la population active -surtout les jeunes entre 15 et 30 ans- est sans travail et sans avenir. En un mot, aux yeux du régime islamique, cette situation est avant tout une menace existentielle contre le système dans son ensemble.
Comment empêcher un effondrement du système ?
L’élection d’Hassan Rohani est le résultat d’une telle situation. Elle représente un choix délibéré du régime et une solution interne au système politique pour empêcher son effondrement. M. Rohani a donc une tâche urgente à réaliser, qui consiste à lever le poids paralysant des sanctions contre le pétrole et la Banque centrale iranienne de façon à ce que les pétrodollars entrent à nouveau dans le pays, lequel ne peut pas survivre sans la rente pétrolière et les importations.
Mais Hassan Rohani ne réalisera pas cette tâche sans régler au préalable la crise nucléaire iranienne à l’échelle internationale, c’est-à-dire sans arrêter le programme d’enrichissement d’uranium du régime. Pour régler cette crise-là, il a, semble-t-il, le soutien du Guide et des Gardiens de la révolution sans l’aval de qui il n’aurait pas été là où il est aujourd’hui. Non pas parce qu’il a été élu par les voix des électeurs. Bien au contraire. Il a été élu car le régime a voulu compter, contrairement au passé, seulement 50,7% de ses voix lui ouvrant le chemin du pouvoir et, par la même occasion, celui de la négociation avec l’Occident.
Gagner du temps ne peut plus être une option
Force est de constater que face à l’attente internationale concernant le dossier nucléaire iranien, le régime islamique n’a guère de choix. Gagner du temps ne peut plus être une option car le temps est justement ce qui manque terriblement au régime et qui, à cause des effets inquiétants des sanctions, ne joue plus en sa faveur.
En un mot, les dirigeants iraniens savent que désormais seul un compromis, surtout avec les Américains, sur la question nucléaire, peut leur éviter un désastre. Ce qui représenterait déjà un tournant important dans l’histoire de la République islamique et qui prouverait que les sanctions peuvent faire plier le régime iranien.
Un compromis risqué pour le régime
Un tel compromis, à supposer qu’il se réalise, n’est pas à terme sans conséquences politiques sur le plan interne, ne serait-ce que parce que le régime doit dire pourquoi, après des années d’intransigeance, il capitule maintenant sur la question nucléaire.
En effet, le régime iranien sait aussi que tout compromis avec l’Occident, en particulier les Etats-Unis, sur le programme nucléaire, serait susceptible de bouleverser la structure d’un Etat par nature antioccidental et de libérer des forces de contradictions. Il y va en quelque sorte de l’avenir du régime. Mais sans compromis le régime risquerait fort de se précipiter vers sa perte.