Avec notre envoyé spécial à Alep, Jérôme Bastion
A Alep, on observe avant tout des combats de rue, comme par exemple dans le quartier de Salah al-Din, au sud-ouest de la ville. D'ailleurs, il y a quelques jours à peine des combats se sont concentrés aux abords du souk près de la Grande Mosquée des Omeyyades. Cette dernière avait été prise par les rebelles au terme de 36 heures d'affrontements avec l'armée régulière, avant de retomber aux mains des forces gouvernementales.
Cependant, à Alep, c'est surtout une guerre d’artillerie qui se déroule avec des tirs de mortier réguliers sur de nombreux quartiers. L'armée conforte son offensive avec des bombardements au canon sur d’autres, parfois des tirs d’hélicoptères ou d’avions.
Enfin, il y a surtout un face à face de snipers un peu partout dans cette ville. Des tireurs sont embusqués. Ils s’observent, se harcèlent depuis les mêmes positions tenues parfois depuis plusieurs semaines, sans avancer sur le terrain parce que la topographie ne le permet pas. Il n’est pas facile ni pour les uns, ni pour les autres, de prendre par exemple une école coincée entre des immeubles. Alors les rues alentour sont inaccessibles à cause de ces tireurs embusqués. Parfois, des corps décomposés gisent au milieu. Et d’un bâtiment à l’autre, les mitraillettes des deux camps se font face et se répondent jour et nuit sans que les lignes de front ne bougent véritablement.
Une ville ravagée et en sursis
On peut dire que les habitants sont en sursis. La ville est vidée d’une bonne moitié des personnes qui y vivent, au moins dans les quartiers du centre. Des quartiers entiers sont entièrement vides et d’ailleurs très endommagés par les bombardements. D’autres abritent encore peut-être une famille sur dix. Seuls les quartiers périphériques sont encore à peu près normalement peuplés.
Dans le centre, quasiment tous les commerces sont fermés. Il n’y a que des étals de produits de première nécessité qui sont installés dans les rues. Parfois, on trouve des petits marchés locaux qui continuent à fonctionner, et qui assurent un ravitaillement minimal.
La circulation et l'électricité sont presque inexistantes. Toute activité économique est à l’arrêt. Les habitants d’Alep travaillent véritablement à leur survie. Ils ne sortent de leur maison qu’en cas de nécessité et, surtout, ils continuent à quitter la ville.
La bataille d’Alep risque de durer longtemps
C’est la crainte majeure. Avec l’hiver qui arrive, les conditions de vie des populations vont être de plus en plus difficiles. Il est certain que, sans un changement radical du rapport des forces, la bataille d’Alep risque de durer encore longtemps. Les positions, les fronts ne bougent presque pas ou alors ils bougent dans un sens un jour, et ils reviennent à leur place antérieure le lendemain ou le surlendemain. Une chose est sûre : la situation va perdurer ainsi probablement des semaines, voire des mois.
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Une réunion sur la Syrie à Paris
Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius reçoit les représentants d'une vingtaine de pays qui soutiennent l'opposition syrienne. L'objectif est de tenter d'aider davantage la population qui souffre des combats. La France finance depuis un mois et demi des conseils révolutionnaires, des sortes de conseils municipaux qui se sont créés dans des zones libérées, d'où le régime a été chassé mais qui sont toujours bombardées.
Cinq représentants de ces conseils seront présents à cette réunion. Parmi eux, Abdel Hamid Baccor, un avocat qui vient d'arriver de Syrie. Il est membre du conseil révolutionnaire civil de la région d'Atareb, à l'ouest d'Alep. Il attend beaucoup de cette réunion en France.