Bâtiments éventrés, victimes transportées vers des ambulances. Depuis ce vendredi 23 décembre au matin, la télévision d'Etat syrienne diffuse les images de ce qui serait des attaques suicide à la voiture piégée visant les services de sécurité.
Les autorités ont immédiatement accusé al-Qaïda d'être derrière ces attaques. Cette position n'est pas surprenante. Le régime syrien accuse en effet régulièrement les terroristes d'être à l'origine des violences qui frappent la Syrie depuis des mois. La vague d'opposition qui touche le pays est pourtant majoritairement pacifique. Selon l'ONU, la répression du régime a fait 5 000 morts en neuf mois.
Un attentat d’al-Qaïda ?
L'opposition en doute. L'Observatoire syrien des droits de l'homme, une ONG basée à Londres, affirme qu'al-Qaïda n'a pas mis les pieds dans le pays depuis dix ans. Pour les comités locaux de coordination, qui organisent les manifestations sur place, il est très curieux que les autorités trouvent les responsables une demi-heure seulement après les attaques. Ils se demandent aussi comment une des voitures piégées pouvait être garée devant le quartier général des services de sécurité, alors que les lieux sont hautement gardés.
Si ce n'est pas al-Qaïda, serait-ce les déserteurs de l'Armée syrienne libre, qui ont déjà attaqué des cibles similaires par le passé ? L’opposition en doute. L'Armée syrienne libre a en effet récemment assuré que sa mission principale était de protéger les manifestants pacifiques.
Les autorités syriennes mises en cause
Ce double attentat intervient à un moment très particulier. Une délégation de la Ligue arabe est arrivée à Damas jeudi 22 décembre pour préparer le terrain à des observateurs qui doivent rendre compte de l'évolution de la situation dans le pays. Après cet attentat, les autorités syriennes peuvent donc désormais se présenter comme victimes des terroristes et montrer que la violence n'est pas du côté auquel on pense. C'est d'ailleurs ce qu'a déclaré, en substance, le vice-ministre des Affaires étrangères syrien lors de sa visite sur les lieux du double attentat avec le chef de la délégation de la Ligue arabe.
La mission de la délégation de la Ligue arabe
L'équipe est là, en éclaireur, pour discuter de la façon dont les observateurs vont pouvoir travailler. Les premiers doivent arriver dimanche 25 décembre. D'après l'accord signé la semaine précédente entre la Ligue arabe et la Syrie, ils doivent s'assurer que les violences cessent, que les détenus arrêtés dans le cadre des manifestations sont libérés. Bref, ils doivent s'assurer que le plan de paix accepté par la Syrie est respecté.
Pour l'instant, Damas n'a pas vraiment fait preuve de bonne volonté. La mission de ces observateurs a été âprement négociée. S'ils sont en théorie autorisés à se déplacer librement, y compris vers les points chauds de la contestation, les observateurs de la Ligue arabe n'auront pas accès aux sites militaires. Selon des informations non confirmées, certains détenus seraient en train d'être transférés des prisons vers ces sites militaires interdits d'accès.
La mission d'observateurs critiquée par l’opposition syrienne
Le Conseil national syrien, qui regroupe les principaux groupes d'opposition syrienne, a dénoncé une manœuvre des autorités pour gagner du temps. Des manifestations d'opposants ont d'ailleurs eu lieu ce vendredi contre les observateurs.
La personnalité du chef de la mission des observateurs, le général soudanais Mohammed Ahmed Moustapha al-Dabi, fait également polémique. Ancien chef des renseignements dans son pays, al-Dabi serait impliqué dans la guerre Nord-Sud au Soudan et dans celle du Darfour. C'est aussi un ancien conseiller d'Omar el-Béchir, le président soudanais actuellement recherché par la Cour pénale internationale pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Une telle personnalité qui ne fait que s'ajouter aux suspicions entourant cette mission d'observation en Syrie.