Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a assisté au lever des couleurs de l’Etat à naître, une Palestine culturelle en quelque sorte qui devient le 195ème membre de l’Unesco, tout juste après le Soudan du Sud, dernier Etat en date à avoir accédé à la souveraineté. « Aujourd'hui nous sommes membres de l'Unesco et nous espérons que de la même manière notre peuple aura son Etat indépendant. Un Etat qui pourra vivre en paix côte à côte avec Israël. Nous espérons que cela ne tardera plus. »
Dans l’immédiat, les Palestiniens pourront au moins défendre leur patrimoine culturel. Et cela n’est pas négligeable au regard des rivalités qui les opposent aux Israéliens, de Bethléem au caveau des Patriarches, de sites bibliques en lieux saints musulmans. Et comme le souligne Mahmoud Abbas : « Chacun sait que l'Unesco est l'organisation qui s'occupe de l'éducation mais aussi des vestiges historiques, du patrimoine culturel, des arts et de littérature. Or tout cela existe chez nous. Cela appartient à la vie quotidienne du peuple palestinien. Ce ne sont pas des questions politiques. Mais cela peut nous aider à obtenir des avancées politiques. »
L’inscription d’un patrimoine palestinien à l’Unesco est un enjeu identitaire très important au regard de la nature du conflit israélo-palestinien. C’est du reste pour ménager leur allié israélien et le vote juif américain que les Etats-Unis ont voté contre l’adhésion d’un membre palestinien à l’agence des Nations unies. Et ils menacent toujours d'opposer leur véto à la demande de reconnaissance que Mahmoud Abbas a déposée le 23 septembre dernier devant le Conseil de sécurité. La France avait finalement voté pour l’entrée à l’Unesco en affirmant que ce geste permettrait peut-être à Paris de convaincre Mahmoud Abbas de se contenter d'aller devant l'Assemblée générale des Nations unies demander un statut d'observateur.
Mahmoud Abbas ne quitte plus son bâton de pèlerin pour tenter de lever les réticences des uns et des autres tout en s’efforçant de capitaliser cette première victoire diplomatique en prêchant un rapprochement aux frères ennemis du Hamas qui contrôlent Gaza. Il s’affirme confiant dans les progrès de ses discussions avec le chef politique du parti islamiste, Khaled Mechaal et ne désespère pas non plus en public de convaincre les Etats hostiles à une reconnaissance pleine et entière d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967.
Contraint depuis des lustres de faire profil bas, Mahmoud Abbas, se veut plus que jamais conciliant à l’Unesco : « Les Etats-Unis sont membres du quartette avec la Russie, l'Europe et le Royaume-Uni. Ils sont des médiateurs entre nous et Israël. Et quand les Etats-Unis prennent une décision contraire à la notre, ça ne veut pas dire que nous sommes des ennemis. Nous respectons leur position et eux, ils restent dans le quartette qui recherche la paix », dit-il.
L’opposition américaine s’est quand même traduite par la suspension de la contribution de Washington à l’Unesco, un trou de plus de 20% dans le budget de l’organisation en guise de représailles. Mais Mahmoud Abbas n’a guère d’autre choix stratégique que de « demander encore et encore » aux récalcitrants de permettre que sa demande soit soumise au vote sans risque de véto. Un vœu pieux que le président de l’Autorité palestinienne a réitéré le 5 décembre dernier au Conseil de sécurité.
Quant à l’alternative ouverte par l’Assemblée générale des Nations unies, elle va se clore à la fin du mois avec la session annuelle 2011. Une année de plus sans Etat palestinien viable en paix avec un voisin israélien qui ne souhaite visiblement pas du tout sa naissance.