Six mois de violences en Syrie, silence au Conseil de sécurité

En Syrie, la répression sanglante se poursuit. Les forces de sécurité ont encore tué des civils ce mardi 27 septembre 2011 dans le sud et le centre du pays. Des chars sont toujours positionnés à Homs, l'assaut par l'armée dans un quartier de la ville aurait fait trois morts. Selon le Haut commissariat aux droits de l'homme des Nations unies, 2 700 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations mi-mars. Six mois après, malgré la violence de la répression, le Conseil de sécurité n'a toujours pas voté de résolution condamnant les violences.

Des « gangs armés », selon le régime syrien

La violence a pourtant atteint des niveaux extrêmes, mais les autorités syriennes continuent à crier au complot de l'étranger et à mettre ces révoltes sur le dos de gangs armés et de terroristes. C'est d'ailleurs ce qu'a affirmé le ministre syrien des Affaires étrangères Walid al-Mouallem dans son discours ce lundi, devant l'Assemblée générale de l'ONU. Il a parlé « d'armement d'extrémistes religieux » et de « provocations médiatiques destinées à semer le chaos et à démanteler la Syrie ». Il faut rappeler qu'avec les el-Assad -d'abord le père, Hafez el-Assad, au pouvoir entre 1970 et 2000 puis le fils Bachar el-Assad, actuellement- le pays est gouverné d'une main de fer. Ce régime a réussi à tenir par la terreur, un Etat policé à l'extrême, et aussi grâce au soutien des minorités religieuses, qui ont sans doute peur d'un retour de bâton après l'ère el-Assad. Le pouvoir martèle d'ailleurs « après nous, ce sera le chaos ».

Les autorités syriennes jouent sur le contexte régional

Damas veut se porter garant du fragile équilibre de la région. Il faut rappeler que la Syrie est à un croisement stratégique, avec au sud Israël, son ennemi qui a annexé le Golan depuis la guerre des Six jours en 1967, mais avec lequel il n'y a pas eu d'affrontement depuis. En outre, la Syrie compte aussi un demi-million de réfugiés palestiniens. Elle jouxte la Jordanie également au sud, le Liban à l'ouest, régulièrement théâtre de tensions avec la Syrie, l'Irak à l'est, et la Turquie au nord, avec laquelle les relations se sont détériorées ces derniers mois.

Deux sessions spéciales du Conseil des droits de l'homme de l'ONU...

Depuis le début des manifestations et de la répression mi-mars, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève a convoqué deux sessions spéciales, une en avril, et une deuxième en août dernier. Des experts avaient été mandatés en avril par le Haut commissariat aux droits de l'homme et, selon eux, les atrocités commises par les forces de sécurité syriennes peuvent « relever de crimes contre l'humanité ». Une commission d'enquête est en cours. Le 19 septembre dernier, devant le Conseil des droits de l'homme à nouveau, la Haut commissaire adjointe a annoncé le chiffre de 2 700 tués, des milliers de blessés. Elle a exhorté à nouveau le Conseil de sécurité à transférer le dossier syrien auprès de la Cour pénale internationale. Mais pour l'instant, rien ne se passe, les moukhabarats (les agents de la police secrète du régime) aidés par les chabbihas (des hommes de main payés par le régime) continuent de terroriser la population et les familles de ceux qui participent aux manifestations : enlèvement, torture, mutilation des corps, de personnes âgées, d'enfants, la barbarie est arrivée à un point d'horreur extrême. Et pourtant, hormis des sanctions par les Etats-Unis et l'Union européenne, au niveau du Conseil de sécurité, rien ne bouge.

... et pourtant pas de résolution en vue au Conseil de sécurité

Les Syriens savent que le Conseil de sécurité ne votera pas de résolution, car la Russie, ainsi que la Chine menacent d'opposer leur veto à toute résolution condamnant les violences. Moscou est un allié historique de Damas. En mai dernier, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait mis en garde contre une intervention étrangère en Syrie et avait appelé la communauté internationale à ne pas répéter un « scénario à la libyenne ». Les Russes, rappelons-le, ne voulaient pas d'une intervention armée en Libye. Et Pékin a, lui aussi, mis en garde contre toute action contre la Syrie.

La crainte que les manifestants ne passent à la lutte armée

D'une part, la communauté internationale peine à réagir, d'autre part, l'opposition syrienne à l'intérieur et à l'extérieur est encore divisée. Des discussions sont en cours sur l'organisation, fin septembre, d'un Conseil de transition syrien qui serait présenté comme une alternative politique. Mais en attendant, certains pourraient être tentés par la lutte armée. Jusqu'à présent, les manifestants se targuaient d'être pacifiques et s'opposaient à toute tentative de prendre les armes, ce qui décrédibiliserait leur mouvement qui veut justement s'opposer ainsi à la barbarie de la répression mise en œuvre par le régime. Certains analystes mettent en garde contre une militarisation de la révolte, car cela pourrait transformer la révolte en véritable guerre civile. Un piège que les comités de coordinations locaux veulent éviter à tout prix.

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