Dix-huit ans ont passé depuis les accords d’Oslo et les Palestiniens revendiquent toujours un Etat que les négociations avec Israël n’ont pas permis de dessiner sur la carte. Le dernier round de discussions entre les deux parties a eu lieu il y a tout juste un an. Et le dialogue s’est immédiatement interrompu, les Palestiniens refusant de négocier avec un gouvernement israélien poursuivant la colonisation.
En ce mois de septembre 2011, le gouvernement palestinien de Salam Fayyad a par ailleurs atteint l’objectif qu’il s’était fixé : bâtir les fondations d’un Etat. Un chantier dont l’ONU, le FMI (Fonds monétaire international) et la Banque Mondiale ont unanimement salué l’accomplissement au printemps dernier, notant que les Palestiniens étaient désormais prêts à gérer un Etat indépendant.
Siège symbolique en bois d’olivier palestinien
Cet Etat « construit de bas en haut », les Palestiniens souhaitent à présent qu’il soit reconnu par la communauté internationale. « Nous disons au monde, au président Obama, au président Sarkozy qui soutiennent les révoltes des peuples syrien, libyen, égyptien et tunisien qu’ils doivent aussi soutenir le peuple palestinien, affirme Hassan Balawi, conseiller au ministère palestinien des Affaires étrangères. Les dirigeants de la communauté internationale doivent se positionner : soit ils sont pour l’occupation soit ils sont contre ».
Les Palestiniens rappellent que Barack Obama s’est opposé à la colonisation lors de son discours du Caire de juin 2009. Et qu’à la tribune de l’ONU en septembre 2010, le président américain a évoqué la perspective d’accueillir le futur Etat palestinien « d’ici un an ».
Dans les messages radio de la campagne « Palestine 194 », les dirigeants de Ramallah assurent que leur but est d’obtenir l’indépendance de l’Etat et son admission pleine et entière aux Nations unies. Un siège symbolique en bois d’olivier palestinien, celui du « 194e Etat-membre » est même actuellement promené de capitale en capitale et arrivera à la fin du mois à New York, siège de l’ONU.
Ce qui fait peur à Israël et aux Etats-Unis
Cependant, ce scénario a peu de chances de se réaliser. S’ils se tournent vers le Conseil de sécurité de l’ONU, les Palestiniens savent qu’ils se heurteront au veto des Etats-Unis.
Le scénario alternatif serait de se tourner vers l’Assemblée générale de l’ONU, où les 193 Etats membres disposent du droit de vote. Et 130 à 150 d’entre eux seraient prêts à reconnaître la Palestine. Mais dans ce cas, la demande serait plus modeste. Les Palestiniens pourraient se contenter de demander le rehaussement de leur statut (ils sont actuellement « observateurs » à l’ONU).
La Palestine pourrait alors être reconnue comme Etat non-membre des Nations unies, c’est le cas du Vatican par exemple. « Ça serait symbolique, c’est exactement ce qui fait peur à Israël et aux Etats-Unis, estime Akram Daoud, doyen de la faculté de droit de Naplouse en Cisjordanie. Israël serait dans l’embarras et les Etats-Unis opposés au monde entier ».
Riposte israélienne
Les Israéliens eux aussi sont en campagne, puisqu’ils restent des pays qui n’ont pas encore dit clairement ce qu’ils voteraient le moment venu, à commencer par de nombreux Européens, dont la France. A l’intention des pays qui ne se sont pas encore déterminés, les dirigeants et diplomates martèlent qu’il n’y a pas d’autre voie que celle de la négociation.
« Un Etat doit émerger d’un accord bilatéral, d’un accord de paix en bonne et due forme, explique Ygal Palmor, porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, et même si les Palestiniens obtiennent une quelconque reconnaissance à l’ONU, ça ne changera rien sur le terrain ».
En Israël, des voix s’élèvent pour demander des actions unilatérales en riposte à celles des Palestiniens. Des ministres et des députés de droite ont déjà souhaité publiquement que les accords de paix d’Oslo soient considérés comme nuls et non avenus, si les Palestiniens se tournent vers l’ONU.
Risque de violences sur le terrain
Certains en Israël agitent aussi le risque de violences sur le terrain, même si l’Autorité palestinienne promet des manifestations « populaires et pacifiques » pour accompagner sa démarche de reconnaissance. L’armée israélienne, de son côté, s’est de dotée de nouveaux matériels de dispersion des manifestations, comme des canons projetant une eau nauséabonde.
Implantés en Cisjordanie, les colons israéliens eux aussi se préparent. « Je vis ici depuis 23 ans. J’ai toujours eu des armes à la maison mais sans les utiliser, confie Shaul Goldstein, qui dirige le conseil local du Goush Etzion, un bloc de colonies juives situé dans la région de Bethléem en Cisjordanie, dans mon village, nous sommes 400 familles, largement plus d’une centaine sont armées. Mais en 23 ans, ici, je n’ai jamais vu personne utiliser son arme. Nous espérons continuer comme ça. Mais si quelqu’un s’en prend à nos femmes et à nos enfants, nous devrons nous défendre. Nous espérons que personne ne nous forcera à le faire… »
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