Crise du pétrole au Qatar: la fin de l'eldorado pour les expatriés?

Après des années à plus de 100 dollars le baril, les prix du pétrole ont baissé de plus de 50% depuis juin 2014. Un net manque à gagner pour les pays exportateurs - et même pour les plus riches d'entre eux comme le Qatar, qui a annoncé des mesures de restriction économique.

De notre correspondante à Doha

Le Qatar est le 3e pays le plus riche du monde en termes de PIB par habitant après le Luxembourg et la Norvège. Pourtant, l'émirat annonce lui aussi des mesures de restriction économique. Des mesures qui concernent directement les expatriés ! Le ministre qatarien de l’Economie l’a annoncé au début du mois, expliquant que si les prix du pétrole restent bas, à moyen terme, leur salaire moyen sera revu à la baisse. Est-ce la fin de l'eldorado pour les expatriés ? Oui, répond un économiste basé au Qatar depuis plusieurs années, pour qui le Qatar va maintenant chercher à rationaliser ses dépenses. Et il n'y a pas de petites économies...

Un employé du secteur pétrolier et gazier raconte à RFI que la société Qatar Petroleum, dont dépendent toutes les compagnies étrangères comme Shell ou Total, a demandé à ces dernières de réduire leurs budgets. Cet employé, à titre d'exemple, n'a plus droit à son téléphone portable de fonction. Il n 'a ni déjeuner de travail, ni paie ni allocation de transport. Son directeur ne peut plus voyager en première classe. Un autre employé explique que des collègues sont licenciés par dizaines. Les projets non essentiels sont finalement abandonnés depuis quelques mois.

Le Qatar possède pourtant des réserves financières de 250 milliards de dollars, mais ces petites économies s'avèrent utiles dans la mesure où l'émirat n'aime pas toucher à ses réserves. Comme la fourmi de la fable, le Qatar est prévoyant : cet argent est pour les générations futures, et notamment quand il n'y aura plus de pétrole.

Préparer l'après-pétrole

L’équilibre budgétaire du pays est menacé quand le baril de pétrole descend sous la barre des 60 dollars, ce qui a été le cas à plusieurs reprises cette année. Or, le Qatar a des obligations à tenir : il ne peut pas revenir sur les infrastructures qu'il doit construire pour la Coupe du monde de football 2022. Sa seule variable d'ajustement concerne la main-d'œuvre qualifiée, ces expatriés qui envoient beaucoup d'argent chez eux - une perte de richesse nationale pour le Qatar.

L'autre solution : mettre la population qatarienne au travail. C'est ce qu'on appelle la « qatarisation ». Le gouvernement veut remplacer les expatriés par des locaux. Non pas à tous les postes évidemment, car ce serait impossible compte tenu de leur faible nombre : les Qatariens sont 200 000 pour 2,2 millions d'habitants dans le pays. La qatarisation concerne néanmoins les emplois très qualifiés, dans les secteurs stratégiques du pétrole et du gaz, mais aussi dans les banques, la santé et l’éducation.

Pour avoir des Qatariens au niveau, une classe préparatoire a vu le jour en 2001 sur le campus Education City à Doha. Elle prépare les futurs étudiants qatariens aux grandes écoles et universités, pour qu'ils puissent revenir au pays avec un vrai bagage universitaire et occuper les emplois actuellement mis à la disposition des étrangers. Quelque 500 élèves suivent cette formation chaque année.

Malgré ces annonces, le Qatar sait qu'il ne pourra jamais totalement se passer de ses expatriés, notamment les milliers d'ouvriers du bâtiment.

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