Elle est au cœur du jeu politique outre-Atlantique et elle fait l’objet de toutes les convoitises : la classe moyenne, ou plus précisément les classes moyennes. Si on se réfère au « Pew Research Center », le revenu moyen d’une famille américaine s’élève à environ 50 000 dollars par an. Selon la définition de cet institut de sondage indépendant, tous les ménages qui gagnent entre 75% et 150% de ce revenu, c’est-à-dire entre 37 000 et 75 000 dollars par an, font partie de la classe moyenne. Cela concerne 8 Américains sur 10, des chiffres qu’il faut tout de même différencier.
Trois « classes moyennes »
Pour les Américains, il existe en effet trois catégories de classes moyennes. Premièrement, la « Upper middle class », des familles aisées. Deuxièmement, la classe moyenne au sens classique du terme. Et enfin, la « Under middle class » : cette dernière catégorie concerne les travailleurs pauvres, des gens qui, même en ayant un emploi, ont beaucoup de mal à joindre les deux bouts. Or aujourd'hui, presqu'un Américain sur trois estime appartenir à cette frange de la population. Ils n'étaient qu'un sur quatre il y a encore sept ans.
L’appauvrissement de la classe moyenne
Les familles américaines ont perdu jusqu’à 40% de leur fortune personnelle durant la crise immobilière de 2007 et 2008 car, aux Etats-Unis, la possession d'une maison représente une grande partie des biens d'un ménage. La crise immobilière a été suivie par une grave crise économique qui a condamné beaucoup de salariés au chômage. Même si, depuis, l'économie américaine a redémarré et que nombre d'entre eux ont pu retrouver un emploi, cet emploi est souvent moins bien payé que celui qu'ils occupaient avant la crise. Il reste donc aujourd'hui aux Etats-Unis une classe moyenne profondément déstabilisée, qui a peur de tomber dans la pauvreté et qui est inquiète pour l'avenir de ses enfants.
Championne des « Américains ordinaires »
C'est cette classe moyenne que cible Hillary Clinton. Dans la vidéo dans laquelle elle annonce sa candidature, on voit d'ailleurs exclusivement des représentants de cette classe moyenne, des gens qui se battent au quotidien, des gens en mouvement, pour avancer malgré les difficultés. Quand la candidate Clinton déclare : « Je veux être la championne des Américains ordinaires », elle s’adresse précisément à cette classe moyenne qui doute aujourd'hui d'avoir encore sa place dans le rêve américain.
Pour le résultat de l’élection présidentielle de 2016, les classes moyennes sont donc d’une importance cruciale. Elles représentent la grande majorité de l’électorat américain. Et surtout, elles sont les plus touchées par les changements radicaux intervenus ces dernières années au cœur de la société américaine.
Barack Obama : Hillary « ferait une excellente présidente »
La veille de l’annonce officielle de la candidature d’Hillary Clinton, l’actuel président américain a ouvert le chemin à son ancienne chef de la diplomatie : « Elle a été une formidable candidate [lors des primaires du parti démocrate, ndlr] en 2008. Elle a été un soutien formidable lors de l'élection présidentielle. Elle a été une secrétaire d'Etat exceptionnelle. C'est mon amie », a déclaré Barack Obama à la presse à l'issue d'un sommet des Amériques marqué par sa rencontre avec le président cubain Raul Castro.« Je pense qu'elle ferait une excellente présidente », a-t-il résumé.
Mais le soutien du président sortant est à double tranchant pour Hillary Clinton. D'un côté, la candidate a besoin de se démarquer de Barack Obama. Le camp républicain tire déjà à boulets rouges sur l'ex-secrétaire d'Etat en clamant : « L’Amérique n'a pas besoin d'un troisième mandat Obama » ou encore « L'Amérique mérite mieux qu'un troisième mandat de politique Obama-Clinton ». Mais de l'autre côté, Hillary Clinton doit faire attention à ne pas paraître trop distante avec le président sortant, puisqu'elle dépend de l'électorat qui a permis à Barack Obama de remporter les élections présidentielles de 2008 et 2012. Hillary Clinton a une chance de devenir la prochaine locataire de la Maison Blanche, seulement si les jeunes, les femmes, les Latinos et les Afro-Américains se mobilisent aussi massivement que lors de ces derniers deux scrutins présidentiels.
Mais tout d’abord, Hillary Clinton doit remporter l'investiture du parti démocrate. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Barack Obama a, certes, dit qu'Hillary Clinton ferait une « excellente présidente », mais il ne lui a pas encore apporté son soutien officiel. Le président souhaite d'abord attendre pour voir qui seront les autres candidats qui se lanceront éventuellement dans la course pour devenir le champion ou la championne du parti démocrate pour la présidentielle de 2016.
Quel rôle pour Bill Clinton dans la campagne de son épouse ?
La question qui fait couler beaucoup d’encre à Washington est de savoir le rôle que jouera Bill Clinton dans la campagne de sa femme. Un casse-tête qui donne du fil à retordre aux stratèges de la campagne Clinton. Tout le monde sait que Bill Clinton est un orateur inné. Dès qu’il arrive sur une scène, l’ancien président tient la salle ; il galvanise les foules. Bill Clinton jouit toujours d'une immense popularité aux Etats-Unis et voudrait bien sûr aider sa femme à remporter d'abord l'investiture démocrate et ensuite la présidentielle.
Mais les conseillers d’Hillary réfléchissent à un engagement bien dosé de Bill Clinton. Il ne faut en aucun cas prendre le risque que le chaleureux ex-président fasse de l'ombre à son épouse qui a le contact beaucoup moins facile avec les gens que son mari. C'est la raison pour laquelle la candidate a pris seule la route ces derniers jours. Direction les Etats comme l'Iowa où se tiendront les premières primaires début 2016, pour se montrer proche des électeurs et de leurs préoccupations.
Dans un premier temps, Bill Clinton pourrait agir en faveur de sa femme surtout à l'intérieur du parti démocrate et auprès des riches donateurs. Mais, connaissant la passion de Bill Clinton pour le jeu politique, personne ne croit vraiment qu'il restera longtemps cloîtré en coulisses. Et à Washington, certains commencent déjà à spéculer sur ce que pourrait être le rôle de Bill, si jamais son épouse était élue à la Maison Blanche.