Au moins 1 634 personnes ont été exécutées l'an dernier dans le monde. « Il s’agit du chiffre le plus élevé jamais recensé par notre organisation depuis 1989. Et encore ! Ce chiffre ne tient pas compte des milliers de personnes probablement exécutées en Chine, où les statistiques sur la peine de mort sont considérées comme un secret d’État », écrit Amnesty International sur son site internet.
Deux faits notables. D'abord, le nombre d'exécutions a augmenté de 54 % entre 2014 et 2015. Ensuite, parmi les 25 pays qui ont appliqué la peine capitale en l'an passé, trois Etats se partagent la responsabilité de 89 % de ces exécutions : l’Arabie saoudite, l’Iran et le Pakistan. « Ces trois pays ont fait exécuter un nombre impressionnant de condamnés à mort, à l’issue bien souvent de procès d’une iniquité flagrante », fait remarquer Amnesty International.
L'Arabie saoudite en pleine régression concernant la peine capitale
« En Arabie saoudite, les exécutions ont augmenté de 76 % par rapport à l’année précédente ; 158 personnes, peut-être davantage, y ont été mises à mort en 2015, la plupart par décapitation, mais certaines ont également été passées par les armes, les corps des suppliciés étant parfois exposés en public », expose l'ONG à l'occasion de la parution de ce rapport 2015.
Anne Denis, responsable de la commission sur l'abolition de la peine de mort à Amnesty International France, explique cette tendance haussière : « L’Arabie saoudite, comme ils sont engagés sur plusieurs fronts politiques, il leur faut montrer qu’ils sont forts à l’intérieur. » Et de noter que les Saoudiens « sont de plus en plus isolés quand même, puisque vous avez dans la communauté internationale la majorité des Etats qui choisissent l’abolition de la peine de mort ».
Le Pakistan, traumatisé par les attentats, se remet à donner la mort
Au Pakistan, plus de 320 personnes ont été exécutées en 2015. « C’est le chiffre le plus élevé jamais enregistré dans ce pays », remarque Amnesty. « Suite à l’attentat de Peshawar, en décembre 2014, les Pakistanais ont fait une loi sur le terrorisme avec la peine de mort (levée du moratoire, NDLR), et ils ont commencé à exécuter début 2015. Mais très rapidement, trois semaines après, on les a vus exécuter massivement des personnes condamnées pour crime de droit commun. »
L'Iran continue de tuer dans le milieu de la drogue, sans barrière d'âge
Concernant l'Iran, pas de nouveauté particulière au cours de l'année écoulée, mais une augmentation tout de même (977 exécutions en 2015, contre au moins 743 en 2014). « C’est toujours un petit peu la même chose, il s'agit d'éliminer certaines personnes. Alors, évoquons les infractions à la législation sur les stupéfiants, parce que ça, il y en a beaucoup. L’Iran, c’est quand même la plaque tournante de l’opium et donc des stupéfiants », décrypte pour RFI Anne Denis.
La plupart des exécutions sont en effet relatives à des infractions de ce type. Mais Amnesty de pointer ce particularisme iranien concernant l'application de la peine capitale : « C’est également l’un des derniers pays au monde à mettre à mort des mineurs délinquants, ce qui constitue une violation flagrante du droit international. Au moins quatre personnes, qui avaient moins de 18 ans au moment des faits pour lesquels elles avaient été condamnées, ont été exécutées en 2015. »
Quelques tendances générales sur l'application de la peine de mort
Concernant les autres pays, des fortes hausses ont été observées ci et là, « notamment en Egypte et en Somalie », précise l'organisation. A l'inverse, « en 2015, quatre pays ont complètement aboli la peine de mort en droit : le Congo (République du Congo), Fidji, Madagascar et le Suriname. La Mongolie a elle aussi adopté un nouveau Code pénal abolissant ce châtiment, qui entrera en vigueur ultérieurement en 2016 », écrit Amnesty.
Quelque 102 pays ont pleinement renoncé à la peine de mort à ce jour. Au total, 140 sont abolitionnistes en droit ou dans la pratique. Mais pour atténuer la tendance du nombre record de pays abolitionnistes dans le monde, remarquons également que « le nombre de pays procédant à des exécutions a augmenté - passant de 22 en 2014 à 25 en 2015. Au moins six pays qui n’avaient mis personne à mort en 2014 l’ont fait en 2015. Des condamnés ont notamment été exécutés au Tchad pour la première fois depuis plus de 10 ans. »