Le tribunal administratif de Rennes devait trancher sur une question de droit. Est-ce qu'un maire peut, seul, prendre une telle mesure d'interdiction ? La réponse est donc « non », le tribunal s’alignant sur la préfecture (donc l’État) qui estimait que cela relèvait des compétences du ministère de l'Agriculture.
Le maire écologiste Daniel Cueff avait pris le 18 mai un arrêté interdisant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques « à une distance inférieure à 150 mètres de toute parcelle cadastrale comprenant un bâtiment à usage d'habitation ou professionnel ». La préfecture avait alors demandé la suspension de cet arrêté en référé au motif qu'un maire n'est pas compétent pour prendre des décisions sur l'utilisation de produits phytosanitaires, y compris au nom du principe de précaution, un pouvoir réservé à l'État.
« dans le sens de l'histoire »
« C’est une décision forcément décevante mais c’est une suspension : le tribunal administratif de Rennes ne s’est pas prononcé sur le fond du dossier de l’arrêté pris par le maire de Langouët mais uniquement sur une suspension avant de se prononcer sur le fond, nous explique Arnaud Delomel, avocat au barreau de Rennes. J’avais indiqué à la sortie de l’audience que personnellement j’étais plutôt positif et confiant : ce qu’a fait monsieur Cueff va dans le sens de l’histoire ; on va arriver à des règlementations qui vont ressembler à ce que lui a pris comme arrêté.
Madame la ministre (de l’Environnement), madame Borne, a dit il y a quelques jours qu’il y avait un cadre règlementaire qui allait être pris et vous allez voir qu’on va se retrouver peu ou prou dans les mêmes dispositions que ce qu’avait fait monsieur Cueff. Donc ça va dans le sens de l’histoire : il peut y avoir encore des blocages ou des réticences mais c’est bien ce qui va se passer : une limitation dans notre pays de la projection de pesticides sur certaines parcelles… »
« C'est quoi le pouvoir d'un maire ? Un maire peut-il ignorer la santé de ses habitants ? », avait plaidé M. Cueff lors de l'audience du 22 août, affirmant qu'il n'avait pas interdit les pesticides, mais instauré « une distance d'éloignement des pesticides sur une parcelle qui reste cultivable avec des produits moins dangereux ».
D'autres maires ont suivi
Plusieurs maires ont pris de semblables initiatives ou manifesté leur soutien au maire de Langouët -commune de 600 habitants- comme la maire socialiste de Parempuyre, commune péri-urbaine de Bordeaux (8.200 habitants) qui a pris un arrêté interdisant « formellement » les produits phyto-pharmaceutiques « à moins de 100 mètres de toute habitation ou espace public ». Comme Daniel Cueff et Béatrice de François, une vingtaine d'autres élus locaux ont interdit l'usage de pesticides sur une partie de leur commune, précise l’AFP.
Le maire et son avocat ont annoncé qu'ils feront appel de cette ordonnance de justice.