Arbitrage Tapie: la justice française relaxe l’ensemble des prévenus

Le tribunal correctionnel de Paris a relaxé l’ex-ministre Bernard Tapie, le PDG d'Orange Stéphane Richard et quatre autres prévenus jugés dans l'affaire de l'arbitrage controversé qui avait octroyé 403 millions d'euros à l'homme d'affaires en 2008 pour solder son litige avec le Crédit Lyonnais.

Pour le tribunal, qui a rendu sa décision mardi 9 juillet, « aucun élément du dossier ne permet d'affirmer » que l’arbitrage en faveur de Bernard Tapie, définitivement annulé au civil, « ait été surpris par la fraude ». Le tribunal n’a retenu ni les infractions de « détournement de fonds publics », ni de complicités de ce délit.

Pour la présidente Christine Mée, « les éléments constitutifs du délit d'escroquerie ne sont pas caractérisés ». Les juges ont donc prononcé la relaxe de l’ex-ministre, absent au délibéré pour raisons de santé. « Une immense satisfaction et une grande libération », a estimé dans la foulée son avocat.

« Très grand soulagement »

Parmi les cinq autres prévenus relaxés, on retrouve Stéphane Richard, jugé pour « complicité » en tant qu'ancien directeur de cabinet de l'ex-ministre de l'Économie Christine Lagarde. L'actuel PDG d'Orange a exprimé sa « très grande satisfaction » et son « très grand soulagement », à la sortie de l’audience. La nouvelle présidente de la Banque centrale européenne avait, elle, été condamnée fin 2016 pour « négligence » par la Cour de justice de la République.

Le parquet avait requis le 1er avril des peines d'emprisonnement contre cinq des six prévenus. Cinq ans de prison ferme avaient été notamment demandés contre Bernard Tapie et trois ans d'emprisonnement, dont 18 mois fermes contre Stéphane Richard.


► ANALYSE

Bernard Tapie devra quand même rembourser les 403 millions d'euros

« Aucun élément ne permet d'affirmer que la décision du tribunal arbitral a été surprise par la fraude ou par des manoeuvres frauduleuses qui auraient été commises par Bernard Tapie », dit le tribunal correctionnel dans son délibéré. Une phrase, celle-ci, suffit à désavouer le parquet et à détricoter son accusation. Les six prévenus étaient initialement jugés pour escroquerie. Mais pour le tribunal, l'accusation n'a pas apporté la preuve de la culpabilité des prévenus, pénalement la relaxe générale s'impose.

Pourtant, au civil, les époux Tapie restent condamnés à rembourser les 403 millions d'euros, qui leur avaient été attribués par le tribunal arbitral. Dans ce volet civil, la justice avait estimé que Bernard Tapie avait été à la fois l'architecte et le bénéficiaire de l'arbitrage, la décision est aujourd'hui définitive.

Aucune cohérence entre ces deux décisions, dit la défense évoquant une histoire insensée. Insensée à plus d'un titre: ainsi Stéphane Richard était à l'époque des faits directeur de cabinet de Christine Lagarde, jugée coupable de négligence par la Cour de justice de la République pour avoir renoncé à un recours contre cet arbitrage controversé.

Mais là encore pour le tribunal, la preuve n'a pas été apportée qu'il a utilisé ses fonctions de directeur de cabinet pour favoriser les intérêts de Bernard Tapie. Deux poids deux mesures, donc. L'affaire Tapie a rendu la justice inaudible.

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