Rapport des sénateurs sur l'affaire Benalla: la contre-attaque du camp Macron

Après le rapport accablant de la commission des Lois du Sénat français dans l'affaire Alexandre Benalla, l’exécutif et la majorité n’ont pas tardé à lancer une vaste contre-offensive musclée.

Le Sénat n’avait pas encore rendu son rapport que dès mercredi 20 février 2019 sur l'antenne de RFI, la porte-parole du groupe La République en marche à l'Assemblée nationale, Aurore Bergé, fustigeait déjà « un précédent dangereux », un Sénat qui selon elle « n’a pas respecté la séparation des pouvoirs », bref une manière de dénoncer « une instrumentalisation politique » d’un Sénat acquis à l’opposition.

Ce même argument sur le respect de la Constitution sera repris toute la journée de mercredi par les députés LREM, mais également plusieurs ministres dont la garde des Sceaux Nicole Belloubet. Objectif : torpiller, discréditer ce rapport du Sénat, qui dénonce des « dysfonctionnements majeurs au sommet de l’Etat » et « des pouvoirs exorbitants, une indulgence » en faveur de Benalla et de ses fameux contrats russes qui « ont pu affecter » tout à la fois « la sécurité du président », mais également « les intérêts du pays ».

Une déclaration de guerre pour l'exécutif

C'est un rapport véritablement accablant. Les sénateurs réclament des poursuites contre l’ancien collaborateur du chef de l’Etat. Ils pointent également du doigt trois hauts responsables de l’Elysée : le directeur de cabinet du président Patrick Strzoda, le secrétaire général Alexis Kholer et le chef du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) le général Lavergne. Tous trois sont soupçonnés « d’omission, d’incohérences et de contradictions », bref de mensonges, lors de leurs auditions au Sénat.

Ces accusations sont vécues comme une déclaration de guerre par l’exécutif. Elles expliquent la riposte musclée de la majorité ainsi qu'une certaine fébrilité également, à l'instar du porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, qui dénonçait mercredi des « contre-vérités » tout en avouant ne pas avoir « encore lu » le rapport du Sénat.

Un rapport « très politique » selon Philippe

Et ce jeudi, c'est le Premier ministre qui est monté au front. « Traditionnellement, la séparation des pouvoirs fait qu'il n'appartient pas ni à l'Assemblée nationale ni au Sénat de se prononcer sur l'organisation interne de la présidence de la République », a dit Édouard Philippe, soulignant que la justice est saisie de cette affaire qui « part d'une dérive personnelle ».

« La commission d'enquête du Sénat et le Sénat ont choisi de se livrer à une appréciation qui est, je crois, très politique. Je n'en suis pas surpris mais comme j'ai un attachement très vif et très grand au principe de séparation des pouvoirs, j'en suis un peu déçu », a-t-il encore déploré.

Le Sénat se défend

Des critiques immédiatement balayées par un Sénat bien décidé – même s’il s’en défend - à jouer le bras de fer avec l'exécutif. La séparation des pouvoirs a été « scrupuleusement respectée ». Si la commission d'enquête du Sénat assure ne pas vouloir « commenter les commentaires », elle n'aura pas mis longtemps à dégainer face aux critiques du premier ministre.

Dans un communiqué publié en début d’après-midi, elle insiste une nouvelle fois sur son indépendance estimant important « pour la maturité de la démocratie » que la mission du parlement soit « pleinement respectée ». Une réponse feutrée mais ferme à la prise de parole inhabituelle quelques heures plus tôt du Premier ministre.  A l’heure où l'opposition dénonce un « scandale d’Etat », l’Elysée promet en tous cas d’apporter « très vite » des réponses à ces « contre-vérités ».

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