Interview de Macron: un exercice de communication critiqué

La mise en scène de l'entretien accordée à France 2 par Emmanuel Macron dimanche soir pendant quarante minutes, était originale : il s'agissait d'une déambulation dans le palais de l'Elysée aux côtés du journaliste Laurent Delahousse. Mais l'exercice n'a pas convaincu de nombreux observateurs, qui l'ont jugé complaisant. Quant au fond, il fut principalement consacré à l'écologie et à l'exercice du pouvoir, sept mois après l'élection d'Emmanuel Macron.

Incarner la modernité en brisant les codes, c'est plus que jamais l'objectif d'Emmanuel Macron. L’un de ses prédécesseurs, Valérie Giscard D'Estaing - à qui on le compare souvent - avait été le premier à s'exprimer au coin du feu à l'Elysée en 1975. Emmanuel Macron, lui, innove en répondant aux questions en marchant, comme une déclinaison de son slogan de campagne. L’interview d'une quarantaine de minutes, entièrement debout, a pris la forme de promenade dans le palais de l'Elysée.

Elle a permis au président de parler de lui, de son bureau, de ses nuits de travail ou encore de son rapport au pouvoir. Cette grande opération de communication, très étudiée, était taillée sur mesure pour un chef de l'Etat à l'aise dans l'improvisation. Comme il le souhaitait, il a pu faire la pédagogie de ses réformes, sans que très peu de contradictions ne lui soient opposées.

C'est justement ce qui suscite critiques et sarcasmes depuis hier soir sur les réseaux sociaux, dans l'opposition, mais aussi dans la presse française et internationale. Comme en atteste ce tweet, emprunt d'ironie, du correspondant de l'agence Reuters à Paris en charge de l'actualité présidentielle.

« L'une des questions les plus dures posées au cours de l'interview de Macron:
"Voilà le sapin de Noël, dans la cour
[de l'Elysée]. C'est la fin de l'année, que souhaitez-vous dire aux Français, n'ayez pas peur?" Le pire du journalisme de déférence à la française. »

Leadership sur le climat

Sur le fond, Emmanuel Macron a parlé en longueur de la question climatique, après le One Climate Summit de Paris. Il annonce la fermeture de toutes les centrales thermiques et à charbon « d'ici à la fin de son quinquennat ». Sa priorité est de baisser les émissions de gaz à effet de serre pour lutter contre le réchauffement climatique. Cela se fera au prix d'un maintien des centrales nucléaires. « Il faut choisir ses batailles », justifie-t-il. Le président vante son leadership international sur le dossier environnemental, même s'il le concède, il n'est « pas un activiste du climat depuis des décennies ».

Concernant la guerre contre l'organisation Etat islamique en Syrie, Emmanuel Macron assure qu'elle sera terminée d'ici « mi, fin février ». Il affirme qu'il « faudra » ensuite « parler » avec le président syrien Bachar al-Assad, lequel devra « répondre de ses crimes ». Sur le plan intérieur, il promet que sa réforme du Code du travail portera ses fruits « dans les cinq ans » et confirme une refonte à venir de l'audiovisuel public.

Popularité en hausse

Cette interview vient parachever une fin d'année marquée par le regain de popularité du chef de l'Etat. L'été avait été meurtrier (une chute de plus de 20 points dans les sondages, à la suite, notamment de sa passe d'armes avec le chef d'état-major d'alors, Philippe de Villiers), la fin de l'automne est plus clémente. Emmanuel Macron repasse au-dessus de la barre des 50% d'opinions favorables. Cette inversion de sa courbe de popularité est inédite (en dehors des temps de guerre ou les lendemains d'attentats), note plusieurs instituts de sondages.

C'est un cadeau d'anniversaire inattendu pour le président qui a fêté ses 40 ans samedi en louant, à ses frais, un gîte quatre étoiles à proximité du château de Chambord, ce qui n'a pas manqué de susciter des critiques sur son style monarchique de l'exercice du pouvoir. Il peut en tout cas attaquer l'année 2018 dans des conditions plus favorables qu'il y a trois mois. Avec sur la table plusieurs réformes difficiles, en particulier celles de l'assurance-chômage, de la formation professionnelle et de l'apprentissage. Les consultations entre l'exécutif et les syndicats sont en cours, Emmanuel Macron veut un vote du Parlement avant l'été prochain.

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