France: Emmanuel Macron veut mieux rémunérer les agriculteurs

Lors de son discours aux Etats généraux de l’alimentation à Rungis, le président Emmanuel Macron a annoncé les premières mesures pour mieux rémunérer les agriculteurs. Le chef de l'Etat a proposé aux producteurs de fixer leur prix à partir de leur coût de production, un changement radical pour la filière.

Actuellement, les prix sont fixés chaque année par les acteurs de la filière. Ces négociations annuelles sont souvent houleuses voir conflictuelles car c'est la grande distribution et les industriels qui fixent le prix d'achat. Les agriculteurs n'ont pas voix au chapitre. Pour éviter trop d'abus, le législateur a mis en place des gardes fous. D'abord en 2008 avec la loi de modernisation, puis en 2016 avec la loi Sapin 2. Mais dans la réalité le rapport de force penche souvent en faveur de la grande distribution. Faute d'accord sur les prix, les enseignes s'autorisent à ne pas mettre en valeur les produits concernés dans les rayons, voire, même, à les retirer.

Redonner la main aux producteurs sur les prix, c'est enlever aux industriels leur prérogative en matière de négociations. L'idée est de protéger les agriculteurs et les producteurs qui n'arrivent plus à vivre de leur travail. Pour cela, il faut mettre un terme à la guerre des prix bas à laquelle se livrent les grands enseignes de la distribution. A force de promotions, le consommateur n'est plus en mesure de connaître le juste prix d'un produit.

Un nouveau contrat entre les industriels, la grande distribution et les agriculteurs

Emmanuel Macron a acté la mise en place d'une loi visant à instaurer un nouveau contrat entre les industriels, la grande distribution et les producteurs. Cette loi en faveur des agriculteurs va permettre de fixer les prix en tenant compte du coût de production. C'est à partir de ce prix de revient que l'industrie agroalimentaire et la grande distribution fixeront leur marge.

On imagine déjà les craintes. Les prix dans les rayons risquent d’augmenter, au détriment des consommateurs. C'est l'argument d'Edouard Leclerc, patron de l'enseigne éponyme qui affirme que des milliers d'articles pourraient augmenter de 5 à 15%. Cette future loi pourrait aussi interdire des prix trop bas et encadrer le prix des ventes à perte. A contrario, Serge Papin, patron de l'enseigne Système U dénonce une situation injuste. Selon lui, les fortes marges se réalisent essentiellement sur les produits agricoles, alors que les faibles marges se font sur les produits de grande consommation.

Un proposition viable ?

Face à la puissance de la grande distribution, la proposition du président Macron d'inverser le mode de calcul du prix, est-elle réalisable ? De fait un procédé similaire est déjà en place, mais ce n’est pas l’agriculteur qui fixe le prix, c’est le consommateur. La nouvelle marque « C'est qui le patron » a lancé il y a 10 mois une brique de lait équitable. Par le biais des réseaux sociaux, ses fondateurs ont soumis aux consommateurs un questionnaire concernant leur attente sur la qualité du lait et combien ils seraient prêts à payer pour. L'expérience est concluante. Ils ont choisi les critères les plus élevés, en incluant des jours de vacances pour l'agriculteur. Soit un coût supplémentaire de 9 centimes par brique de lait pour le client. Résultat : dix-huit millions de briques de lait ont été vendues en dix mois. Preuve pour Nicolas Chabanne, cofondateur de la marque « C'est qui le patron » que la proposition d'Emmanuel Macron est viable.

Reste que le président de la République ne pourra rien contre le commerce international. Il y aura toujours des enseignes à bas coût pour proposer des produits venant de l'étranger à des prix concurrentiels.

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