Emmanuel Macron n'aura pas attendu longtemps pour convoquer le Congrès. A peine le président de la nouvelle Assemblée nationale élu, le chef de l'Etat a confirmé la date qui circulait déjà, celle du 3 juillet. Emmanuel Macron avait affirmé lorsqu'il n'était que candidat qu'il voulait s'exprimer chaque année devant les parlementaires. La question, explique l'Elysée, était donc celle « du top départ » de ces réunions du Congrès en ce début de quinquennat. Emmanuel Macron a choisi de s'exprimer très vite.
Le procédé est assez inhabituel. Si le chef de l'Etat est en droit de s'exprimer devant le Parlement réuni à cet effet en Congrès, c'est-à-dire députés et sénateurs siégeant ensemble, c'est plutôt lors de réformes constitutionnelles qu'il le fait. Là, cela ressemble beaucoup à ce que peut faire le président américain lors du discours annuel sur l'état de l'Union. Pour Emmanuel Macron, ce sera l'occasion de donner le cap et rappeler les réformes déjà lancées et envisagées.
Ce discours va intervenir quelques heures avant la déclaration de politique générale d’Edouard Philippe. Mais à entendre l'entourage du président de la République, son intervention n'éclipsera pas celle de son Premier ministre. Les deux prises de parole sont présentées comme complémentaires, « articulées » l'une avec l'autre, écrites en concertation.
Edouard Philippe n'en prendrait pas ombrage. Une députée de La République en marche explique même qu'il a bien compris le mode de fonctionnement d'Emmanuel Macron et que chacun est dans son rôle. Au président de la République, l'impulsion politique ; au Premier ministre, la mise en œuvre. Ce qui n'empêchera pas l'un de prendre plus la lumière que l'autre.
« Squeezer le gouvernement »
L’annonce a cependant suscité des critiques. Pour le chef de file des députés Nouvelle gauche à l’Assemblée Olivier Faure, ce discours du président devant le Congrès renvoie à une conception « la plus archaïque de la Ve République ». Cela « symbolise le retour du pouvoir personnel », écrit-il dans un communiqué. Mais Olivier Faure va plus loin. « Il y a une humiliation du Premier ministre », estime-t-il. Il « cherche à contourner son propre gouvernement et à prendre les devants avec un Premier ministre qui sera condamné à simplement répéter le lendemain devant l’Assemblée ce que le président aura dit la veille. »
Le président de l’Union des démocrates et indépendants Jean-Christophe Lagarde, lui, a annoncé qu’il ne se rendra pas à Versailles lundi, car il estime que cela revient à évincer le gouvernement. « Il avait dit pendant la campagne qu’il souhaitait présider et laisser le gouvernement gouverner. C’est squeezer le gouvernement que d’intervenir la veille de la déclaration de politique générale du Premier ministre à l’Assemblée », a-t-il affirmé à l’AFP.
Emmanuel Macron n'est pas le premier chef de l'Etat français à s'exprimer devant le Congrès, ce qui lui est permis depuis la révision constitutionnelle de 2008 alors qu'il ne pouvait auparavant y communiquer que par la voie de messages lus. Le 22 juin 2009, c'est devant le Congrès que Nicolas Sarkozy avait annoncé le remaniement du gouvernement dirigé par François Fillon et le lancement d'un emprunt pour financer les mesures gouvernementales à venir.
Six ans plus tard, le 16 novembre 2015, son successeur François Hollande s'y est à son tour exprimé afin de « rassembler la Nation » après les attentats qui trois jours plus tôt avaient fait 130 morts à Paris. C'est à cette occasion qu'il avait appelé à un loi permettant la déchéance de nationalité.