Après l’effroi et les condamnations unanimes, l’église, parlant d’un « acte atroce » qui discrédite ses auteurs, les représentants d’islam d’un « acte les plus lâches », l’heure est aux appels à la cohésion. Tous les représentants des cultes se disent conscients d’une chose : c’est la coexistence entre les religions qui est visée, la cohésion nationale que Daech veut briser.
A l’issue de leur rencontre avec François Hollande ce mercredi matin, les représentants des cultes en appellent à la résistance et à la maîtrise de soi, selon les termes du pasteur François Clavairoly. Le cardinal Vingt-Trois appelle à ne pas tomber dans le jeu politique de Daech, à ne pas céder à la haine et Dalil Boubakeur, le recteur de la Grande mosquée de Paris, appelle lui les musulmans à participer à ce bloc de la Nation. « Il faut prendre en main la formation des imams, réformer nos institutions », a déclaré Dalil Boubakeur. L’épreuve sera forcément longue, ont conclu les représentants des cultes, qui se sont présentés bras dessus bras dessous devant l’Elysée.
Diviser la communauté nationale
« C’est un geste qui fait mal ! Et il aura, là, réussi absolument son objectif de faire du mal, se désolait hier Dalil Boubakeur, recteur de la mosquée de Paris. De diviser les musulmans de l’ensemble de la communauté nationale, de créer les conditions du risque d’amalgame, de réaction, de rupture de ce modèle français qui était le vivre ensemble, et donc de susciter, comme on l’a déjà vu à propos de Nice, pour des quartiers musulmans mais même pour monsieur ou madame tout le monde, toute une manifestation de rejet concernant les musulmans et tous ceux qui ont utilisé le mot inconsidérément, le mot 'islam', qui pèse réellement sur les musulmans de France qui ne savent comment se libérer de cette accusation ou de cette menace ! »
L’attaque du 14 juillet dernier sur la promenade des Anglais à Nice, qui a provoqué la mort de 84 personnes, est aussi bien présente à l'esprit de l’imam de Lyon, Kamel Kabtane. « Le fait de s’attaquer à l’église et à son prêtre c’est la suite du 14 juillet, explique Kamel Kabtane. Effectivement, le 14 juillet, c’était s’attaquer au fondement de l’Etat, à l’Etat républicain. Et aujourd’hui on s’attaque au fondement religieux du pays que sont les églises. On essaie par tous les moyens de créer entre les citoyens de ce pays des situations très difficiles. Certains promettent aux musulmans la mort, justement en réaction de ce qui se passe ! Il faut que toutes les bonnes volontés, quelles qu’elles soient, aujourd’hui se mobilisent pour faire face à cette situation-là ! ».
Peur aussi dans la communauté musulmane
Dans la commune de Saint-Etienne-du-Rouvray, la vie quotidienne a repris son cours. Dans le quartier de la cité Château Blanc, classée zone urbaine sensible, l'église sainte-Thérèse et la mosquée sont voisines. La mosquée a d'ailleurs été construite il y a une quinzaine d'années sur une parcelle cédée par l'église. Une cohabitation jusqu'ici sans histoire mais les habitants craignent l'avenir.
Déjà hier soir, après l'attaque, des femmes musulmanes rencontrées par l'un de nos envoyés spéciaux à Saint-Etienne-du-Rouvray ont spontanément raconté leurs peurs.
Une peur que les responsables locaux des divers cultes vont s’efforcer de canaliser. La réflexion commune a déjà débuté.