■ Des stations-essence en pénurie
A l’entrée du port du Havre, les automobilistes lancent des regards envieux. Devant eux, une station-essence pleine et sans file d’attente. Trop beau pour être vrai : « Que pour les véhicules prioritaires. »
Face à la pénurie d’essence, des préfectures comme celle de Seine-Maritime dans le nord-ouest de la France ont décidé de réquisitionner des stations-service pour les véhicules d’urgence. Pour les pompiers, douaniers, gendarmes et agents du Samu, les cuves sont pleines.
Postés devant les pompes, quatre agents de police filtrent les entrées. La station est réservée aux véhicules d’urgence. « La station est réquisitionnée. A priori, les cuves sont pleines ici et sont vraiment réservées aux véhicules de secours. Si tout le monde respecte ça, il n’y a pas de soucis pour nous », explique cette infirmière du Samu.
« C’est très ennuyeux tout ça »
Dans la région du Havre, les stations-service se font de plus en plus rares. « On a demandé si vraiment on pouvait prendre un petit peu d’essence pour une personne qui a des soucis pour marcher », explique une retraitée. Celle-ci a attendu d’être sur la réserve pour faire le plein de la voiture de leur mère. « Elle ne peut avoir que son véhicule pour faire ses courses. Et on nous a dit que non. On ne comprend pas, mais on fait avec. Qu’est-ce que vous voulez qu’on vous dise. C’est très ennuyeux tout ça », déplore la dame.
Avec la poursuite du mouvement social, l’arrêté préfectoral s’est même durci, car depuis mercredi, les ambulances et les médecins ne sont plus considérés comme véhicules prioritaires.
■ Le gouvernement maintient sa ligne de fermeté et puise dans les réserves stratégiques
Pas question de reculer face à la rue et la CGT. « Tout sera mis en œuvre pour assurer l’approvisionnement en carburant des Français », assure le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll. Et d'ajouter : « L’Etat le fera de façon déterminée et sereine. » L’évacuation des dépôts bloqués va donc continuer.
Pour faire face aux difficultés d'approvisionnement, le secrétaire aux Transports, Alain Vidalies, a affirmé que la France a puisé dans ses réserves stratégiques de carburant. Au total, il s’agit de trois des 115 jours de stock.
« Les stocks stratégiques représentent environ trois mois de consommation moyenne calculée sur l'année précédente », détaille Francis Duseux, le président de l'Union française des industries pétrolières (UFIP).
Pas de recul sur la loi Travail
Fermeté aussi sur la loi Travail. Ce matin, Bruno Le Roux, président du groupe socialiste à l'Assemblée, s’était dit prêt à revoir l’article 2 de la loi Travail, le plus contesté. « Mais la CGT ne demande pas ça, mais le retrait. Il n’y a donc pas à revenir sur les principes de cet article », rétorque Stéphane Le Foll.
Sans fermer la porte donc à une réécriture, le gouvernement ne veut montrer aucun signe de faiblesse aujourd’hui.
■ Pour la CFDT, la radicalisation est une stratégie
Même si la grogne contre la loi Travail reste intense, tous les syndicats ne sont pas opposés au projet de loi El Khomri.
Laurent Berger ne ménage pas ses efforts pour défendre le projet de loi Travail dans les colonnes du journal Le Parisien. A tel point que le secrétaire général de la CFDT estime qu'un retrait du texte serait inacceptable. Pour lui, qui a inspiré la nouvelle mouture du projet « y renoncer, c'est renoncer à de nouveaux droits pour les salariés ».
→ A (RE)LIRE : Code du travail: les syndicats unis contre le projet de loi El Khomri
Principal regret du syndicaliste : la radicalisation du mouvement engagée, notamment par la CGT. Selon plusieurs analystes, le syndicat de Philippe Martinez joue son va-tout pour redorer son blason et conserver le statut de premier syndicat français, à l'occasion de la prochaine mesure de représentativité en 2017.
Or, la loi El Khomri pourrait favoriser ce changement. En cause : celle-ci privilégie la négociation d'entreprise plus proche de la culture des syndicats réformistes et donc du syndicat de Laurent Berger. Face à ce risque, face aussi à ses difficultés internes, la CGT aurait donc choisi la carte de la radicalisation dans l'espoir de récupérer des voix aux élections professionnelles.