Il voulait être un président normal, il est devenu un président martial : trois guerres en trois ans. La première fut déclenchée au Mali. En février 2013, François Hollande est accueilli en sauveur à Bamako et déclare « Je veux ici vous dire que je viens sans doute de vivre la journée la plus importante de ma vie politique ». A l’Elysée, les conseils de Défense se succèdent : Mali, puis quelques mois plus tard Syrie. « Le massacre chimique de Damas, dit François Hollande fin août 2014, ne peut rester sans réponse. Et la France est prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents ».
« Punir », le mot est inédit dans la bouche d’un président français, le premier et loin d’être le dernier. Fin août 2015, lors de la décoration des passagers du Bruxelles-Paris qui ont évité un attentat le chef de l’Etat a cette phrase : « Face au mal qui s’appelle le terrorisme, il y a un bien, celui que vous incarnez ». Le 13 novembre 2015 au soir, visage tendu, voix affectée et une expression pour résumer le drame « ce qui s’est produit à Paris et à Saint-Denis près du stade de France, c’est un acte de guerre ». En chef de guerre inattendu et assumé, à l’extérieur, comme sur la scène intérieure, François hollande ne mâche pas ses mots.
Les affaires privées font du bruit
Sur la vie privée en revanche, les mots sont rares. Dès les premiers pas à l’Elysée, il y a ce tweet vengeur de Valérie Trierweiler, sa compagne, prenant parti pour Olivier Falorni, candidat PS dissendent aux législatives à la Rochelle face à Ségolène Royale. Et une simple phrase pour mettre fin à ce premier gros couac du quinquennat lors de son premier 14 juillet : « Les affaires privées se règlent en privé ». Dix-huit mois plus tard François Hollande apparaît casqué à la Une d’un magazine people. En conférence de presse, sous le regard de dizaines de journalistes, le malaise est palpable, les mots, quasi les mêmes « les affaires privées se règlent en privé, ce n’est donc ni le lieu ni le moment de le faire ».
L'orientation social-démocrate
Parole minimale sur sa vie privée, non-dits et contournements pour sa politique économique : le 31 décembre 2012, lors de ses vœux de fin d’année François Hollande fait cette annonce « Je propose un pacte de responsabilité aux entreprises. Il est fondé sur un principe simple : moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur leurs activités, et en même temps, une contrepartie : plus d’embauche, plus de dialogue social ». Le lancement du pacte de responsabilité, l’acte 1 d'une politique économique toute tournée vers les entreprises, «une politique social-libérale» crie une partie de la gauche. Réponse du président en forme de pirouette quelques jours plus tard en conférence de presse « ceux qui n’ont pas compris que j’étais social-démocrate peuvent encore poser une question ».
Président de la République, ex-militant à gauche
Social-démocrate ou social-libéral ? S’ouvre un procès en trahison, s’installe un doute. Et ce doute François Hollande a bien du mal à le combattre. Comme en février 2016 sur France Inter : « Mais êtes-vous encore de gauche François Hollande ?» Réponse : « Je suis président de la République, je représente tous les Français». Relance : « Mais êtes vous encore de gauche ?» Réponse : « Mon parcours, ma vie, mon engagement, mes choix, sont toujours ceux qui permettent de respecter l’égalité, la dignité humaine, et le progrès». Relance :« Mais vous dites-vous de gauche ? ». Réponse : « Toute ma vie est une vie d’un homme qui s’est engagé à gauche ». Relance: « Elle a changé votre vie en 2012 ? ». Réponse : « Je suis devenu président de la République, je suis toujours engagé comme je l’ai été, mais je ne suis plus un militant ».
Aides aux entreprises, explosion du chômage, assouplissement du droit du travail, fiasco de la déchéance de nationalité, prolongation de l’état d’urgence, la liste des reproches, des malentendus, des déchirures s’allonge. A quelques mois de la campagne présidentielle François Hollande va devoir trouver comment renouer le dialogue avec sa gauche.