C'est ce que l'on appelle «mettre les pieds dans le plat». Jean-Marie Le Guen a relancé de manière inattendue le débat de la légalisation du cannabis. « Je propose que le Parti socialiste dise enfin la vérité. L’interdit moral n’interdit rien du tout ! Et donc que nous réfléchissions aux moyens pour que nous mettions fin à cette politique de prohibition ».
Cette déclaration du secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement a immédiatement provoqué une réaction du porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll, pas du tout sur la même ligne : « Ce n’est pas la position du gouvernement. Et il n’y a aucune piste, ni de travail ni de réflexion, d’engagée au gouvernement sur cette question ».
Jean-Marie Le Guen, qui est médecin, aurait donc parlé uniquement à titre personnel. A titre personnel aussi Najat Vallaud Belakacem est contre la légalisation : « Moi, je suis assez hostile à ce qu’on envoie un signal qui donnerait l’impression qu’on baisse la garde sur la lutte contre les drogues. Au mieux, que ce soit un jour l’objet d’un débat de campagne présidentielle, pourquoi pas. Mais pas en ce moment, pas à la fin d’un quinquennat, de façon trop précipitée ».
Mais pourquoi Jean-Marie Le Guen a-t-il donc évoqué ce sujet polémique maintenant ? A droite, Laurent Wauquiez n'a pas tardé à réagir en posant une question : « Est-ce que c'est la façon de répondre aux attentes des jeunes ?» Début d'une polémique.
■ Les addictologues souhaitent un débat
Si le moment n'est pas jugé propice, les professionnels de santé eux se disent favorables à l'ouverture d'un débat, bien que connaissant les dommages causés par le cannabis. Longtemps considéré comme une drogue douce, le cannabis serait en réalité bien plus dangereux que ce que l'on pensait. « Sur les fonctions exécutives et cognitives, c'est vrai que cela a un impact au niveau cérébral. Il y a aussi quelque chose qui est moins connu, ce sont les débuts de cancer de la vessie chez les moins de 30 ans. Bien sûr que cela a un impact sur les fonctions psychiques, il y a donc des jeunes qui vont développer des psychoses, c'est bien connu maintenant », explique Eric Hispar, président de la commission d'addictologie des Hôpitaux de Paris.
Seuls avantages, à condition de bien doser, certaines molécules du cannabis sont anti-douleur et anxiolitiques. Mais ce n'est pas la principale raison pour laquelle Eric Hispar souhaite l'ouverture d'un débat sur la dépénalisation : « Je pense que la communauté addictologique est vraiment en faveur de la dépénalisation. Dans cette notion de prise de produit, il faut partir du principe qu'il y a un réel problème de comorbidité [La comorbidité désigne les maladies qui en accompagnent souvent une autre : NDLR] . Il vaut peut-être mieux être plus incisif sur le côté éducatif, la manière de savoir ce qu'il se passe, plutôt que de faire comme si cela n'existait pas». Enfin la dépénalisation permettrait de mieux maîtriser la qualité et donc les substances ingérés par les consommateurs.