Le procès de Jérôme Cahuzac va-t-il faire long feu?

Le procès de l’ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac, poursuivi pour fraude fiscale et blanchiment, s’ouvre ce lundi 8 février 2016. Mais il pourrait faire long feu.

Non bis in idem. Cette locution latine pourrait bien abréger ce procès de l'affaire Cahuzac. Traduction : nul ne peut être jugé deux fois pour les mêmes faits. C'est ce que vont plaider les avocats de l'ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac et de son ex-compagne au moment où ils déposeront une question prioritaire de constitutionnalité à l'ouverture de l'audience ce lundi.

Les époux Cahuzac sont poursuivis pour blanchiment de fraude fiscale et pour avoir éludé l'impôt de solidarité sur la fortune. Lorsqu’elle avait éclaté début 2013, quelques mois après le début de la présidence de François Hollande, l'affaire avait provoqué un véritable séisme politique. Accusé d'avoir un compte en banque caché en Suisse, l’ancien ministre du Budget avait tout d'abord nié avant de reconnaître les faits et démissionner (voir encadré).

Mais les deux prévenus ont déjà été condamnés dans un tribunal civil, ce qui leur a valu un redressement fiscal. Et même si ce nouveau procès est un procès correctionnel, il a lieu pour les mêmes raisons. Pour les avocats du couple, il ne devrait donc tout simplement pas se dérouler.

Reste à savoir quelle décision prendra le tribunal au moment de la demande des avocats. Il peut la rejeter tout de suite, mais il est plus probable qu'il prenne le temps de réfléchir. Auquel cas, le procès Cahuzac sera renvoyé à une autre date, quelques instants seulement après avoir commencé. Jérôme Cahuzac risque 7 ans de prison et 1 million d'euros d'amende.


■ Jérôme Cahuzac, la chute d’un ambitieux

François Hollande avait promis une « République exemplaire » et fait de Jérôme Cahuzac, son ministre du Budget, le redresseur des comptes de la nation et le héraut de la lutte contre l'évasion fiscale. Cahuzac le strauss-kahnien, ambitieux, excellent orateur et portant beau : l'image était belle. La chute n'en sera que plus brutale.

En décembre 2012, Mediapart accuse le ministre d'avoir possédé un compte caché en Suisse. Stupeur et tremblements à l'Elysée. Pendant trois mois, Jérôme Cahuzac nie tout en bloc. « Les yeux dans les yeux », il jure au président puis à l'Assemblée nationale qu'il n’a jamais eu de compte dissimulé. Fin mars, il avouera pourtant, en se présentant comme un homme « dévasté par le remords ».

Le scandale est retentissant et fragilise le chef de l'Etat qui annonce très vite sa volonté de « réhabiliter » la vie politique en faisant voter les lois sur la transparence de la vie publique. La procédure éclaboussera finalement plusieurs de ses proches. Les ministres Thomas Thévenoud et Yamina Benguigui seront écartés. Le premier pour ne pas avoir déclaré ses impôts, en raison de sa « phobie administrative » ; la seconde pour avoir caché une partie de son patrimoine. Accusé de prise illégale d'intérêts, le conseiller Aquilino Morelle sera également éconduit.

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