« Nicolas Sarkozy est reparti en vrille. Il dit n’importe quoi ! » Les députés de gauche sont en colère. Comme l'écologiste François de Rugy, ils appellent à voter pour des candidats de droite dans le Nord, le Grand-Est et le Sud-Est pour faire barrage au Front national dimanche prochain. Et voilà que le chef du parti Les Républicains leur complique encore plus la tâche.
« Il a essayé de faire gagner le Front national, accuse François de Rugy au micro de RFI. Il a essayé de faire perdre ses amis. Il a tellement peu d’estime pour Xavier Bertrand [en Nord-Pas-de-Calais-Picardie], Christian Estrosi [Paca] et Philippe Richert [Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes]. » Le chef de file des députés socialistes, Bruno Le Roux, a de son côté estimé que Nicolas Sarkozy « ouvre une crise dans la droite républicaine » en parlant « comme l'extrême droite ».
A droite justement, où on a remis la grande explication à l'après-régionales, les députés soutiennent l'opération de charme de Nicolas Sarkozy. Pour Philippe Gosselin (Manche), il a raison de tendre la main aux électeurs FN : « Toutes les stratégies qui, depuis des années et des années, cherchent à stigmatiser les électeurs du Front national en les traitant d’idiots, de gens immatures, ça ne marche pas. »
Sarkozy peu demandé
Mais de là à dire, comme l'a fait Nicolas Sarkozy, que voter PS, c'est voter FN : « Ça, c’est une autre histoire. On va laisser le président [du parti], sur ce plan-là, s’exprimer. Mais on verra tout ça la semaine prochaine. Aujourd’hui ce n’est pas l’essentiel. L’essentiel c’est de se concentrer sur les projets, les listes, les candidats en évitant de se jeter des petits noms d’oiseaux à la figure. »
Reste que ça ne se bouscule pas chez les têtes de liste LR pour accueillir le président du parti. Hormis Virginie Calmels (Aquitaine-Limousin-Poitou-Charente) et José Rossi (Corse), aucune ne souhaite s'afficher avec l'ancien chef de l'Etat cette semaine, relève d'ailleurs Le Parisien. Xavier Bertrand, seul en lice face à Marine Le Pen dans le Nord, a même vivement attaqué, ce mercredi, les ténors de sa formation, notamment Nicolas Sarkozy, enjoints de « se taire ».
■ [Reportage] La campagne bretonne, ses champs et ses peurs
Avec notre envoyé spécial à Saint-Malon-sur-Mel, Pierre Olivier
La route s’enfonce dans la campagne bretonne. Des champs à perte de vue, voici Saint-Malon-sur-Mel, 605 habitants, 32 % de votes Front national dimanche dernier. Ce retraité préfère rester anonyme : « Si la liste du Front national se représente, je voterai Front national parce qu’il y en a marre. Que ce soit les uns ou les autres, on entend toujours la même chose, mais on n’a aucun résultat. Le Front national, on verra bien. On peut essayer, il ne faut pas en avoir peur. »
Perdue au bout d’un chemin, l’exploitation agricole de Louis et sa femme. Eux sont exaspérés par l’immigration maghrébine : « A dix kilomètres, il y a un marché tous les dimanches. Sur les terrasses, tout ça, ce que tu vois, c’est toujours des… Moi, je ne peux pas côtoyer ces gens-là. Peut-être qu’ils sont aussi bien que moi, je ne sais pas. Comme les Portugais, les Espagnols, ils sont venus en France. Ils se sont adaptés au rythme français. Mais eux, non. » Mais quand on leur demande s'ils sont confrontés à l'immigration : « Non. Du tout. »
A Saint-Malon-sur-Mel, le Parti socialiste arrive tout de même deuxième. Cet habitant tente de prendre du recul : « C’est un village un petit peu reculé. Ils ont beaucoup de peur. Par ignorance, vous avez peur. Vous savez, s’il y a un petit vol ici dans le village, c’est obligatoirement des étrangers. Moi, je le traduis comme ça le vote FN. »
En Bretagne, près de cinquante communes ont placé le Front national en première position, bien que le Parti socialiste soit arrivé largement en tête au niveau régional.