Une Marseillaise chantée a cappella et reprise par la salle debout après une minute de silence en hommage aux victimes du 13 novembre. C'est ainsi qu'a débuté le dernier meeting de la campagne de Claude Bartolone en Ile-de-France, avant que Patrick Pelloux, l'un des rescapés de Charlie Hebdo, ne prenne la parole avec des mots très forts : « nous avons un nouveau nazisme, le nazisme islamique, qui est en train de taper, de nous massacrer. Nous sommes en effet dans un état d'urgence, nous sommes dans une guerre. »
Et puis la guerre a repris ses droits, et Manuel Valls a délivré son message : « Votez dimanche aussi pour transformer un geste en une grande manifestation nationale pour la République ! »
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Le vote comme une réponse aux terroristes, mais aussi selon Claude Bartolone, comme un moyen d'empêcher le Front national d'être l'arbitre des élections : « Ne pas aller voter, c'est faire sourire le Front national ! »
Le FN, l'ennemi désigné par Manuel Valls : « Il faut résister et dénoncer la supercherie de ceux qui divisent, et convaincre nos compatriotes qui peuvent être tentés par ce vote ! », s'est encore écrié le chef du gouvernement.
Emparer à tout prix le FN de s'emparer d'une région, c'est peut-être sur sa capacité au soir du premier tour à convaincre les socialistes d'accepter certains sacrifices pour y parvenir que Manuel Valls jouera sa crédibilité.
A Marseille, une campagne
A deux jours seulement du premier tour des élections régionales, plusieurs inconnues demeurent, notamment en Provence Alpes Côtes d'Azur où la présidence à la région, tenue par la gauche depuis 1998, aurait de fortes chances d'échapper aux socialistes si l'on en croit les différents sondages.
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Un dernier sondage Ifop pour le journal Nice-Matin le 30 novembre donne une mauvaise dynamique au soir du premier tour pour la liste socialistes/MRC/parti radical de Christophe Castaner (16%) et celle LR/UDI/Modem de Christian Estrosi (28%), tout en donnant le Front national emmené par Marion Maréchal Le Pen largement en tête dimanche soir (42%).
Une inconnue de taille : la participation, généralement peu élevée lors de ces enjeux locaux. Abstentionnistes comme indécis, ces électeurs constituent la clef du scrutin. Dans les secteurs dits populaires, cette participation est encore plus faible qu'ailleurs. A Marseille, lors des dernières municipales, de la Belle de Mai aux quartiers nord où s'est rendu notre correspondant Stéphane Burgatt, le taux d'abstention était de dix points supérieur au reste de la ville. Un électorat très potentiel et source de convoitises. Les principaux partis font la chasse au FN. Les électeurs eux semblent peu concernés.
Une sortie d'école, dans les quartiers nord. Tracts en main, Stéphane Mari, colistier socialiste, cible et parcourt le secteur conquis par l'extrême droite aux dernières municipales. « Alors pour l'instant, on croise les doigts, l'accueil n'est pas défavorable. Pas enthousiaste, mais pas défavorable, parce que c'est un secteur où le Front national fait ses meilleurs scores, ils arrivent même à frôler la barre des 50% au premier tour », témoigne-t-il.
Mais à l'approche du scrutin, premier constat : les électeurs semblent peu informés, voire pas du tout motivés - « Ah je vote pas moi, je vote qu'aux présidentielles ».
Et beaucoup sont tout simplement indécis : « Honnêtement, on n'attend rien de spectaculaire. Ce sera vraiment au feeling, au niveau des programmes. »
Sur le terrain électoral, militants et collistiers de diffférents partis s'attaquent exclusivement au Front national. Et quand Jean-Marc Coppola du Front de gauche rencontre les responsables associatifs pour faire passer son message, le benjamin de la liste Les Républicains, Ludovic Pernet, cible lui les différents marchés de la ville où il se heurte parfois aux déçus : « avec vous, ça changera jamais! Stop ! », s'exclame ce passant.
Pour sa part, Stéphane Ravier, tête de liste départementale du Front national, refuse d'adapter son discours aux zones sensibles, secteurs longtemps considérés comme un bastion socialiste et des électeurs qu'il appelle, dit-il, « à se libérer de leurs chaines électorales ».