Après avoir évoqué « un mécanisme permanent et obligatoire » pour l'accueil des réfugiés et proposé la tenue d'une conférence internationale à ce sujet, le chef de l'Etat français a pointé du doigt « les causes » de la crise : le terrorisme, la guerre, et plus précisément l'organisation jugée responsable, à savoir le groupe Etat islamique. « Nous voulons savoir d'où partent les attaques, où sont les centres d'entraînement », a expliqué François Hollande, qui a annoncé des vols de reconnaissance dès ce mardi sur le territoire syrien. Des frappes aériennes seront ensuite décidées.
Troupes au sol : « irréaliste » et « inconséquent »
Il est donc désormais envisagé d'employer, sur le territoire syrien, les moyens jusque-là déployés par la France en Irak. Mais il n'y aura pas de forces terrestres. La France limite son engagement à des frappes aériennes. Le président Hollande juge en effet « irréaliste » et « inconséquent » l'envoi de troupes au sol. « Il ne peut être question pour nous de favoriser le président Bachar el-Assad », a-t-il souligné. François Hollande a aussi réaffirmé que l'issue de la guerre en Syrie passera nécessairement par une transition politique. A un moment ou un autre, Bachar el-Assad devra donc partir, selon François Hollande. Mais désormais, son éviction n'est plus un préalable.
Pour Frédéric Pichon, la France veut sortir de son isolement
Pour Frédéric Pichon, chercheur associé à l'université de Tours, ce changement dans la politique de la France en Syrie est le fruit d’une volonté de « récupérer ou de rattraper un certain nombre de retards et d’avancées trop audacieuses ». L’auteur de Syrie : Pourquoi l'Occident s'est trompé (2012), estime que la France s’est retrouvée isolée sur le dossier syrien comme sur le dossier du nucléaire iranien, et que les annonces de François Hollande sont « du réalisme, tout simplement ». Pour Frédéric Pichon, le conflit syrien « nécessite une vision multipolaire pour son règlement. Et cette multipolarité doit tenir compte de nombreux acteurs : les pays arabes, mais aussi l’Iran et la Russie. Et les Etats-Unis ».
L’annonce de François Hollande est, dans cette optique, « une manière de prendre acte de la réalité et de voir que la politique suivie jusqu’ici a été un échec », juge le chercheur. « Des initiatives au sommet entre même les Etats-Unis et la Russie sont en cours. Il y a des discussions sur le règlement de la crise syrienne. Et je crois que la France veut faire partie de ces discussions. Qu’elle veut être là au moment où ces discussions se tiendront. »
Gérard Longuet juge les frappes aériennes insuffisantes
Gérard Longuet, ancien ministre français de la Défense, s’est pour sa part « réjoui, car il faut que la France soit à l’offensive ». Mais pour le sénateur Les Républicains de la Meuse, l’annonce de François Hollande « ne résout absolument rien. D’ailleurs, lui-même s’en rend parfaitement compte ».
« Les vols de reconnaissance ne permettront pas d’identifier la préparation d’actions terroristes sur notre territoire, c’est une certitude absolue. Et les frappes, si elles interviennent – nous le savons d’expérience – ne changeront pas la détermination de ces combattants. Hélas, les solutions sont beaucoup plus complexes et beaucoup plus lourdes », déclare celui qui était ministre de la Défense en 2011, lorsque la France menait des frappes sur la Libye de Kadhafi.
Gérard Longuet plaide par ailleurs pour que la France « obtienne une résolution des grandes puissances au sein du Conseil de sécurité, dont la Russie » et souhaite voir « un accord politique qui soit accepté et soutenu par les puissances régionales que sont la Turquie, l’Iran et l’Arabie saoudite. Tant que nous n’aurons pas cet accord politique, rien ne pourra se faire. »
Frappes au sol : Eric Woerth précise ses propos
Interrogé par RFI, Eric Woerth, membre de la direction de Les Républicains, est pour sa part revenu sur ses propos du 3 septembre dernier, sur Europe 1, lorsqu’il avait plaidé en faveur d’une intervention au sol en Syrie. « Personne n’a jamais pensé envoyer des troupes françaises toutes seules au sol en Syrie ou en Irak. Ce que je pense, et qu’un certain nombre de personnes pensent, c’est que l’on ne résoudra pas le problème de Daech définitivement sans troupe au sol, sans aller sur le terrain. Personne ne peut penser que l’on résoudra cette question uniquement avec des coordonnées GPS et des avions », a-t-il expliqué. « Troupes au sol veut dire, d’abord, des troupes de la région », a-t-il précisé.