envoyé spécial à Cannes,
Parmi les 19 films en lice pour la Palme d'or, on découvre cinq films français et trois italiens, mais pas de favoris. Plus que ceux des habitués de la Croisette comme Jacques Audiard, Kore-Eda Hirokazu, Matteo Garrone, Nanni Moretti, Gus Van Sant ou Paolo Sorrentino, ce sont les films réalisés par le Grec Yorgos Lanthimos et le Hongrois Laszlo Nemes qui suscitent actuellement le plus d'intérêt parmi les quelque 40 000 festivaliers. Lanthimos est très attendu avec The Lobster qui s'annonce assez kafkaïen avec un héros menacé d’être transformé en animal. Quant à Nemes, il n’ambitionne rien de moins que de renouveler le regard sur la Shoah avec son premier long métrage Le fils de Saul, une histoire morbide autour du Sonderkommando à Auschwitz.
À côté de ce seul premier film en lice pour la Palme d’or, il y a dans toutes les sections cannoises cette année au total 24 longs métrages qui concourent pour la prestigieuse Caméra d’or de la meilleure première réalisation. Parmi les candidats, il y a Natalie Portman qu’on retrouve pour la première fois derrière la caméra pour Une Histoire d’amour et de ténèbres, un film beaucoup moins glamour que son image de star hollywoodienne oscarisée.
Le cinéma africain en sélection officielle
Quant à la présence de cinéastes africains… Après Grigris de Mahamet Saleh Haroun en 2013 et Timbuktu d’Abderrahmane Sisskao en 2014 (boudé par le jury de Cannes et entré dans l’histoire du cinéma comme le film africain le plus populaire et le plus primé de tous les temps avec plus de 1,2 million d’entrées et 7 Césars), cette année, aucun film africain ne figure sur la liste des films en compétition, même si le Malien Souleymane Cissé, doyen du cinéma africain, jouit de la reconnaissance d’une séance spéciale pour son nouveau film O Ka (« Notre Maison) en sélection officielle.
De l’autre côté, ce que certains observateurs ont vite qualifié de négligence ou d'oubli, est peut-être simplement le signe que le Fespaco a cette année mieux fait son travail avec des films burkinabè prometteurs au programme, mais aussi Rapt à Bamako, le premier film tourné en numérique du Malien Cheick Oumar Sissoko ou Price of Love, l’amour impossible entre un chauffeur de taxi et une prostituée à Addis-Abeba, filmé par l’Éthiopien Hermon Hailay. À Cannes, c'est justement un autre (premier) film éthiopien, Lamb, du jeune Yared Zeleke, qui fait entrer ce pays cette année pour la première fois en sélection officielle sur la Croisette.
« Sueurs froides » d’Alfred Hitchcock
De toute façon, jusqu’ici, personne n'a pu citer un réalisateur d'un pays africain injustement refusé à Cannes. D'autant plus que d'autres pays comme l'Autriche, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne ou le Royaume-Uni, sont cette année également absents de la sélection officielle. Les Etats-Unis, très attendus avec l’arrivée de Pierre Lescure à la tête du Festival, affichent seulement deux films, avec Carol de Todd Haynes et La Forêt des Songes de Gus Van Sant.
À la fin, cela sera aux frères Joel et Ethan Coen en tant que présidents du jury d’attribuer la Palme d’or au meilleur film. Pour se préparer à ce difficile exercice, rien de mieux que de regarder la cérémonie d’ouverture de ce soir à partir de 19h (heure française) où Benjamin Millepied, le nouveau directeur du ballet de l’Opéra de Paris chorégraphiera la scène d’amour de Sueurs froides d’Alfred Hitchcock.