Cette fameuse « présidentialité » après laquelle François Hollande courait depuis le début de son quinquennat est désormais installée. Aujourd’hui le climat d’unité nationale, ce qu’on appelle « l’esprit du 11-Janvier », joue toujours pour le président.
Cet esprit, à droite, on l’avoue sans fards, on aimerait bien en finir. Comme le précise le député UMP Philippe Gosselin : « Pour être honnête, oui j’en ai marre du climat du 11-Janvier. Je ne remets nullement en cause le rôle du président de la République. Je ne veux pas être le premier à casser le vase de Soissons, mais on ne peut pas honnêtement mettre ce plan-là uniquement en avant en disant "le reste ce n’est pas grave". Il y a de vraies questions économiques qui se posent, la croissance et le chômage, et celles-là, on ne peut pas les contourner au nom de la sacro-sainte unité nationale. »
La croissance, le chômage, les sujets sur lesquels François Hollande échoue depuis le début de son quinquennat et que la droite espère voir revenir le plus vite possible sur le devant de la scène pour pouvoir à nouveau s’opposer. Car sous couvert de l’anonymat, on ne cache pas à l’UMP avoir aujourd’hui le moral dans les chaussettes. Pour un responsable du parti, « avec sa gestion des attentats, François Hollande a tué le débat, il a définitivement assis son leadership pour 2017 ».
« Hollande m'a épaté »
Le regard de l’opposition, le regard des Français, a changé, et même celui de certains de ses compagnons de route ! Un de ses fidèles au gouvernement disait en début de semaine : « Pendant ces jours difficiles, François Hollande m’a tout simplement épaté ». Pour son vieil ami et visiteur du soir à l’Elysée, Julien Dray, François Hollande s’est surtout révélé « dans cette épreuve, parce que c’est un moment de vérité, les gens qui le connaissaient mal ou pas bien ont découvert la réalité du personnage. Il a livré le fonds de sa personnalité : ces moments importants de décision et d’émotion le pays les a vécus avec lui. Souvent les historiens - et François Mitterrand aussi -, disent que De Gaulle a été un grand personnage parce qu’il y a eu la Seconde Guerre mondiale. On sentait qu’il y avait dans le pays une dépression très forte qui était d’ailleurs parfois inexplicable, une sorte de désespérance qui avait gagné l’ensemble de ceux qui normalement tirent le pays, et puis là on sent qu’il y a un possible sursaut de fierté, d’honneur et de fraternité, une envie d’autre chose. C’est à lui d’être en phase avec ça et d’écrire une histoire longue. »
Mais écrire une histoire, faire le récit de son quinquennat, proposer une vision au pays François Hollande jusqu’ici n’y est pas arrivé. Ses conseillers, ses proches lui reprochaient de naviguer entre deux types de discours soit trop « techno », soit bien trop général et vague. Ça aussi c’est terminé. C’est en tout cas ce qu’estime Frédéric Dabi, directeur du département opinion de l’IFOP. « Le président Hollande "nouveau", c’est un président qui va oser. Maintenant faire des annonces, c’est prendre des risques. La dernière grande annonce de François Hollande qui a marqué l’opinion c’est l’inversion promise de la courbe du chômage qui ne s’est pas réalisée. Aujourd’hui, il est bien sûr attendu sur les questions de laïcité et de vivre ensemble parce que les événements de janvier ont fortement interrogé les Français sur le pacte républicain et sur la fraternité républicaine, mais un président qui parlerait uniquement de questions sociétales prêterait le flanc aux critiques classiques qu’on a vues s’adresser à lui pendant le mariage pour tous : mettre la focale sur le questions sociétales pour délaisser à dessein les questions économiques et sociales qui sont au cœur des préoccupations des Français. C’est ce subtil équilibre que François Hollande devra trouver. »
Désormais le plus difficile pour le président, c’est de faire que « l’esprit du 11-Janvier » ne retombe pas. Après avoir dû affronter des abîmes de défiance, voilà un exercice totalement inédit pour lui : gérer un regain de popularité pour peut-être relancer son quinquennat.