Quelque 700 000 personnes ont défilé samedi dans plusieurs villes de France pour rendre hommage aux 17 victimes des trois attentats jihadistes qui ont suscité une vague d'émotion dans le pays et à l'étranger. « Il s'agit là d'une réaction de sursaut républicain, de rassemblement », a déclaré le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve.
Sans attendre la mobilisation de dimanche, près de 30 000 personnes ont défilé en silence sur la promenade des Anglais à Nice, brandissant des pancartes « Je suis Charlie », en référence à l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo où 12 personnes ont été tuées mercredi. « Profitez de cette marche silencieuse, car nous sommes un peuple qui ne se taira jamais », pouvait-on lire sur une pancarte. A Toulouse, 120 000 personnes sont parties symboliquement à 14h30 des allées Jean-Jaurès, le fondateur du journal L'Humanité assassiné en 1914. A Nantes, 75 000 personnes ont manifesté sous une pluie fine mais continue derrière une banderole « Vivre ensemble, libres, égaux et solidaires ». La marche a été ponctuée de salves régulières d'applaudissements, tandis que certains manifestants entonnaient la Marseillaise.
A Orléans, 22 000 personnes se sont rassemblées et se sont longuement recueillies sur la place principale de cette ville d'un peu plus de 100 000 habitants. A Pau (Pyrénées-Atlantiques), environ 35 000 personnes sont descendues dans la rue en mémoire des victimes. A Marseille, 50 000 personnes ont défilé du Vieux-Port jusqu'au quartier de Castellane. A Lille, ce sont 40 000 personnes qui ont défilé en mémoire des victimes, en présence de la maire Martine Aubry. Des défilés, certes plus modestes, ont eu lieu aussi loin que Bangui (RCA) ou Johannesburg (Afrique du Sud). Les slogans d'hommage continuaient à fleurir partout jusqu'en Inde. Plusieurs milliers de personnes, dont de nombreux musulmans, ont manifesté samedi dans le centre de Milan, dans le nord de l'Italie.
Hommages en série sur les terrains de sport
Dans les stades de foot et de rugby, sur les pistes de ski, par des minutes de silence, des chants ou des gestes symboliques, acteurs et spectateurs des compétitions sportives organisées samedi ont rendu hommage aux victimes des attentats qui ont endeuillé la France. Seule note détonnante, une banderole déployée par des supporters de Bastia avant le match de L1 contre le PSG, disputé par les joueurs avec un brassard noir. « Le Qatar finance le PSG... et le terrorisme », pouvait-on lire sur cette bannière.
« On ne leur fait pas une minute de silence mais une minute d'applaudissements », a de son côté lancé le président du RC Toulon, Mourad Boudjellal, avant le coup d'envoi du match de Top 14 contre le Racing Métro. Mourad Boudjellal est l'ancien éditeur des dessinateurs de Charlie Hebdo, Charb et Tignous, tués dans l'attaque. « Parce que Charlie », ont clamé en choeur à trois reprises les milliers de spectateurs du stade Mayol. Adaptant ainsi, en hommage à Charlie Hebdo, l'hymne du club toulonnais, le Pilou-Pilou, qui se conclut d'habitude par les mots « Parce que Toulon ».
Avant le coup d'envoi et comme pour tous les autres matchs de Top 14 du weekend, les joueurs portaient un T-shirt « Nous sommes tous Charlie ». Et sur l'écran géant, lors de la présentation des équipes, le prénom de chaque rugbyman a été remplacé par un seul et même « Charlie ». Symbole fort à Chaux-Neuve (Doubs), pour l'épreuve de Coupe du monde de combiné nordique, la phrase « Je suis Charlie » a été inscrite dans la neige sur la piste de réception du tremplin de saut à ski.
En Angleterre, l'attaquant international Bafetimbi Gomis a brandi un drapeau français après le but de son équipe de Swansea contre West Ham. L'entraîneur de l'AS Rome, Rudi Garcia, a offert des crayons aux journalistes lors de sa conférence de presse à la veille du derby contre la Lazio, en mémoire des dessinateurs de Charlie Hebdo. Et c'est derrière un carton « Je suis Charlie » posé sur la table qu'il s'est exprimé. En Espagne, une minute de silence a été observée sur tous les terrains de foot de Liga et de deuxième division en mémoire des victimes des attentats en France.