Emploi, chômage et formation, les handicapés cumulent les obstacles

Ce sont les associations qui sonnent l’alerte. En à peine six ans, le nombre de chômeurs chez les personnes handicapées a doublé. On le sait, les temps sont durs pour tout le monde, mais pour elles tout est infiniment plus compliqué. Cette 18e semaine pour l’emploi des handicapés qui s’ouvre ce lundi 17 novembre est l’occasion de le rappeler.

Plus que jamais, souligne Prosper Teboul le directeur général de l’Association des Paralysés de France (APF), « les données sont alarmantes avec un doublement historique en six ans du nombre de chômeurs ». Organisatrice de cette 18e semaine de sensibilisation, l’Association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (Adapt), veut attirer cibler son action cette année sur la « sécurisation des parcours », de la scolarisation à la vie professionnelle. 

Risque de rupture

A chaque étape de la vie, une personne handicapée a besoin, comme tout valide, d’être accompagnée. Mais quand cela fait défaut que ce soit « du collège au lycée, du lycée à l’école professionnelle, à l’université ou dans une école supérieure, à chaque fois qu’il y a passage, il y a un risque de rupture pour un jeune handicapé », insiste le directeur de l’Adapt, Eric Blanchet.
 

Cette démarche est depuis toujours au centre de l’action de l’Adapt qui appuie 12 000 personnes handicapées. Que ce soit par le soin, l’éducation, la formation, l’insertion et l’accompagnement, l’association veille ainsi à minimiser, voire à éviter, les ruptures de parcours qui peuvent dans certains cas aggraver les risques d’isolement.

Le risque est bien réel quand on constate qu’à la fin de 2013, 413 421 personnes handicapées étaient à la recherche d’un emploi. Bien que les entreprises soient de plus en plus sensibilisées à leur embauche, leur taux de chômage a connu une hausse de 11,5 % en un an (deux fois plus rapide que pour l’ensemble des chômeurs) ; pire, il a carrément doublé depuis 2007, en à peine six ans donc.

Certes il y a la crise, mais on doit savoir que les personnes handicapées sont touchées plus durement que les autres. Ainsi, un demandeur d’emploi handicapé sur deux est chômeur de longue durée, près de la moitié a plus de 50 ans ; au total leur taux de chômage avoisine les 22 %, contre 9 % en moyenne pour l’ensemble de la population. Un emploi perdu cela peut se transformer en plusieurs années de difficultés, car, comme l’explique le président de l’APF, « une personne handicapée qui perd son travail met en moyenne quatre ans avant de reprendre pied dans l’emploi ».

Accès à la formation divisé par deux

Et quant à ceux qui ont un travail, ils sont le plus souvent employés dans les secteurs les moins qualifiés, relève l'Observatoire des inégalités. « Près des trois quarts (74 %) des travailleurs handicapés reconnus par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (Cdaph) sont soit ouvriers, soit employés, contre 50 % de l’ensemble des actifs, 6 % seulement sont cadres contre 18 % des actifs », détaille l’Observatoire.

Une situation qui découle directement à leur manque de qualification, conséquence d’un parcours scolaire plus difficile. Ainsi, précise l’Adapt, 29 % des demandeurs d’emploi handicapés ont un niveau inférieur au CAP. De plus, on ne fait pas grand-chose pour faciliter leur progression. « Le système de formation professionnelle est en train d’exclure les handicapés, alerte le président de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa). En trois ans, ajoute Yves Barou, l’accès a été divisé par deux ».       

Par ailleurs, les associations s’inquiètent d’un prélèvement de 29 millions d’euros que le gouvernement a fait adopter lors de l’examen du projet de budget 2015 et qui vient amputer les réserves du fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. La même ponction est prévue pour l’insertion dans les entreprises privées. Un bon sujet de débat pour la prochaine conférence nationale du handicap prévue en décembre. Le président de l’APF, Alain Rochon a déjà averti « qu’il voulait [à cette occasion] des actions réelles et concrètes, pas un compte rendu de différents rapports ».

Les entreprises de plus de 20 salariés ont l'obligation d'employer 6% de personnes handicapées, sous peine de pénalités financières. Mais selon l'APF, ce taux est « autour de 4,5% » dans le public et proche de 3% dans le privé.

 

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