L’article 1er de ce projet de loi « anti-jihad » prévoit la possibilité de confisquer les papiers d'identité d’un individu, pour 6 mois maximum, lorsqu’il existe des « raisons sérieuses » de penser qu’il va mener des activités terroristes à l’étranger. Cette interdiction administrative de sortie du territoire sera soumise au contrôle d'un juge administratif. Celui-ci pourra être saisi en référé et statuer très rapidement. La personne ciblée aura quant à elle une possibilité de recours contre cette décision.
Une autre disposition importante de ce texte, l’article 5, crée un nouveau délit : l'entreprise individuelle à caractère terroriste. Il s’agit en fait d’une déclinaison personnelle du délit d'association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste. Une mesure qui a pour objectif de mieux lutter contre le phénomène des « loups solitaires », ces autoentrepreneurs du terrorisme, comme Mehdi Nemmouche, auteur présumé de l'attaque du musée juif de Bruxelles.
Une grande boîte à outils antiterroriste
Mais pour cibler un suspect, il faudra réunir au moins deux conditions parmi les suivantes : avoir séjourné dans une zone de combat ; consulter régulièrement des sites d'incitation au terrorisme ; et s'entraîner au maniement des armes, à la fabrication d'engins explosifs ou encore au pilotage.
Dans cette boîte à outils antiterroriste, l’article 9 offre enfin la possibilité de bloquer administrativement les sites internet glorifiant le terrorisme, sous 24 heures, dès lors que l'hébergeur refuse de supprimer les contenus visés. Sur 122 sites jihadistes répertoriés, une dizaine de sites francophones pourraient être concernés par cette mesure.
Mais cette dernière disposition fait débat au sein de la majorité. Huit députés socialistes et quatre députés écologistes ont déposé des amendements pour la supprimer. Selon eux, le blocage de ces sites serait facilement contournable. Il pourrait aussi faire des victimes collatérales en restreignant l’accès à d'autres sites aux contenus licites hébergés sur les mêmes serveurs. Enfin, Internet reste un bon moyen pour les enquêteurs de repérer et de suivre les candidats au jihad.
Il y a urgence
Dans une interview au Journal du Dimanche, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve se veut réaliste : « Ce ne sera pas techniquement imparable, mais notre action permettra de perturber suffisamment, d’entraver à défaut d’empêcher. Ce sera aussi un appel au sens des responsabilités de tous les opérateurs du Net, de l’éditeur au fournisseur d’accès », avance-t-il.
Et il y a urgence. En 6 mois, les départs de jeunes Français pour le jihad ont augmenté de 50%. Selon le ministre, 930 ressortissants français, ou étrangers vivant habituellement en France, sont impliqués dans le jihad en Syrie ou en Irak. Parmi eux, 350 sont sur place, faisant de la France le premier contributeur du contingent européen des combattants islamistes.