Ce serait une clé USB qui aurait parlé. Une clé récupérée il y a trois semaines dans les locaux de Bygmalion par les officiers de police judiciaire en charge de cette affaire. « On a pu accéder à la double comptabilité qui a été mise en place pendant la campagne de Nicolas Sarkozy, pour masquer l’explosion des dépenses de meetings du candidat, explique Mathilde Matthieu, qui a coécrit l’article de Mediapart. Sur cette clef, figuraient en effet deux dossiers. L'un est intitulé « Factures 2012 » et son contenu semble confirmer les comptes officiels du candidat Sarkozy.
Supercherie
Mais la supercherie serait en fait contenue dans le second dossier. Dissimulé sous le nom de « Balances 2012 » se trouvent toutes les autres factures établies par Event et Compagnie, la filiale de Bygmalion, au parti de Nicolas Sarkozy. Des factures portant sur les mêmes rassemblements publics que ceux déjà réglés, et sur lesquelles figurent des prestations beaucoup plus chères. Trois à quatre fois, voire jusqu'à 7 fois le prix officiel dans certains cas.
Au total, ce sont ainsi plus de 21 millions d'euros qui auraient été versés à Event et Compagnie pour cette campagne alors que les comptes officiels du candidat Sarkozy ne font apparaître qu'une somme de 4,3 millions. « Ça fait donc un différentiel de 17 millions de dépenses liées à l’organisation de meetings, qui ont été cachés aux autorités de contrôle françaises, conclut ainsi Mathilde Matthieu. On est loin, très loin du dépassement de quatre cent mille euros repéré par le Conseil constitutionnel et qui avait conduit à l'invalidation des comptes de campagne.
Ce mardi, l'ancien directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy, Jérôme Lavrilleux, a été placé en garde à vue pendant quelques heures avant d’être relâché dans la soirée.
Réactions à l'UMP
Les révélations de Mediapart ont naturellement provoqué des réactions politiques, surtout à l'UMP, où Eric Woerth juge ces chiffres « surprenants ». L'ancien ministre du Budget de Nicolas Sarkozy estime cependant que Nicolas n’est pas responsable. « Je pense qu’un candidat à la présidentielle [ne fait pas] le compte meeting par meeting. Si on n’attire pas son attention, si on ne tire pas une énorme sonnette d’alarme pour lui dire : "attention, là on est au taquet", le candidat, il déroule sa campagne, et il veut tous les jours en faire plus [...] Il souhaite l’excellence, une densité d’action extrêmement forte, notamment dans ce cadre précis de l’élection de 2012. »
Luc Chatel rappelle quant à lui que l’UMP a « mis en concurrence trois sociétés d’audit qui doivent faire un état des lieux d’ici une quinzaine de jours. Nous avons retenu un cabinet qui nous rendra pour le premier juillet un état de la santé financière du parti. […] Dans le même temps, nous allons rencontrer le Pôle bancaire, de manière à ce que nous puissions faire un état très transparent de la situation des comptes de l’UMP vis-à-vis de nos adhérents et du grand public, parce que nous sommes un parti politique qui doit rendre des comptes. »
→ À (RE)LIRE : France: Bygmalion, obstacle au retour de Sarkozy ?