Est-ce l'influence des visages des madones, la délicatesse des détails, la force des grandes compositions... c'est presque recueilli que le visiteur déambule au milieu des tableaux de Raphaël et de ses disciples.
En guise d'apothéose quoi de plus parlant que les portraits sensuels et habités du maitre comme celui de son amante la donna velata (La Dame voilée). Plus de cinq siècles nous sépare de son ami Baldassare Castiglione, emprisonné dans son cadre, mais son regard à l'expression si vivante est presque dérangeant.
Raphaël, une sorte d’équilibre général
« Raphaël a apporté à la peinture quelque chose qu’on compare à ses grands contemporains comme Léonard ou Michel-Ange, qui est une sorte de génie de l’équilibre, de l’harmonie et de la beauté, expliqueVincent Delieuvin, commissaire de l'exposition au musée du Louvre. Léonard, c’est très beau, mais beaucoup plus intellectuel, il n’y a pas autant de sensualité. Michel-Ange, c’est plus violent, c’est plus expressif, plus dure aussi. Raphaël a apporté à la peinture une sorte d’équilibre général entre la force, la puissance, la beauté, l’expression, la tendresse. C’est cette synthèse qu’on lui doit, ce génie propre à Raphaël, et on le sent vraiment dans cette exposition. »
Raphaël, né en 1483, est un jeune homme qui a très vite assimilé les procédés de ses maitres comme Pérugin, mais aussi les nouveautés de Léonard de Vinci ou Michel-Ange. C'est le pape Jules II della Rovere qui lui donnera sa chance, le conviant au Vatican dans le cadre d'une grande campagne de rénovation.
Raphaël et les papes
« Il faut savoir, au départ, Raphaël arrive, et ce n’est pas facile pour lui, avance Vincent Delieuvin. Il est l’un des participants des grandes campagnes de décoration. Le pape ne supporte plus de vivre dans l’appartement de son prédécesseur, Alexandre VI Borgia, Jules II décide de décorer toute la nouvelle série d’appartements. Il invite plein de monde, des artistes de toute l’Italie. Raphaël vient de la lointaine ville d’Urbino, il s’est formé à Florence, mais il reste un petit jeune de 25 ans qui n’avait encore rien démontré. Il fait ses premiers essais. On commence à lui donner une des fresques et c’est tellement extraordinaire, que Jules II ne va pas seulement lui donner être le seul et unique exécuteur, le seul responsable de ses appartements. Il lui donne même la possibilité de détruire tous les autres décors qui ont été faits, dont un décor de son propre maitre Pérugin, celui qui l’avait formé. »
Le successeur de Jules II, Léon X, exige bien plus encore de Raphaël. Il veut du mobilier somptueux, des fresques et des tableaux destinés aux souverains avec lesquels il doit s'entendre. Mais être le favori du pape génère aussi des demandes des princes et des grandes familles. L'artiste croule sous les commandes et crée un modèle d'atelier, assisté des meilleurs comme Giulio Romano ou Gianfrancesco Penni. Son entreprise satisfait les demandes de l'Europe toute entière et tue d'épuisement un génie à l'âge de 37 ans.
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Raphaël, les dernières années, exposition au Musée du Louvre, jusqu’au 14 janvier.