La France est une terre d'immigration. L'importance de la deuxième et de la troisième génération d'immigrés est presque une exception française par rapport au reste de l'Europe. Cette particularité s'explique par l'ancienneté des migrations de travail et les liens avec les anciennes colonies.
Jusque dans les années 1970, l'immigration est surtout économique et plutôt masculine. Le phénomène ne va pas durer, avec le regroupement familial elle se féminise et se diversifie aussi. L'origine des migrants est plus variée : initialement issue de l'Afrique subsaharienne et du Maghreb, elle s'ouvre vers la Chine, mais aussi l'Espagne, le Portugal, la Turquie. Les descendants d'immigrés évoqués dans cette étude - des personnes nées et résidant en France, ayant un ou deux parents immigrés - sont évalués à 6,7 millions, soit 11% de la population globale.
Français à part entière et pourtant...
Cette étude brise quelques idées reçues : neuf enfants d'immigrés sur dix se sentent Français. Ils ont presque tous la nationalité française (97 %). Ils revendiquent leur attachement à cette République. Ils sont plus diplômés et gagnent mieux leur vie que leur parents et pourtant ces enfants de la deuxième et troisième génération d'immigrés ne sont pas toujours considérés et perçus comme des Français à part entière. Ils réussissent moins bien que les Français ayant des parents nés en France, c'est ce que révèle cette étude de l'Insee.
On constate que leur parcours scolaire est difficile en France. Ils sont 14% - contre 4% pour le reste de la population - à estimer avoir été moins bien traités à l'école notamment en matière d'orientation. « En effet, ils sont davantage envoyés dans des filières technologiques et professionnelles », explique Sylvie Lagarde, directrice régionale Ile-de-France à l'Insee. Autre constat, 30% des enfants d'immigrés sortent du système scolaire sans diplômes ou au mieux avec le brevet des collèges. Il y a tout de même des exceptions encourageantes, les filles de l'immigration marocaine et tunisienne décrochent plus souvent le baccalauréat que les jeunes françaises
Plus instuits que les parents
Les enfants de migrants sont plus instruits que leurs parents. Leur niveau d'instruction s'élève et l'on sait que ceux qui migrent sont les plus diplômés. De fait, de nombreux étudiants suivent un cursus qui va jusqu'au doctorat. Mais il y a quand même un paradoxe, ils restent nombreux à n'avoir aucun diplôme : ils sont 38% des immigrés de 30 à 49 ans.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Ils montent à 29% pour les enfants d'immigrés africains contre 11% pour les Français dits « de souche ». Globalement, cette étude confirme que les descendants d'immigrés d'Afrique sont pénalisés sur le marché de l'emploi. Ceux qui sont les moins diplômés occupent des emplois précaires. Ce sont les ouvriers que l'on voit sur les chantiers les plus pénibles, les femmes sont « nounous » dans les quartiers chics de la capitale, elles font aussi le ménage ou gardent les personnes âgées.
Victimes de discrimination
Cette étude pointe aussi la question sensible des discriminations. Les immigrés sont deux fois plus nombreux à se déclarer victimes de discrimination. Les discriminations existent et sont reconnues, notamment celles liées à l'origine, à la couleur de peau. Il faut rappeler que c'est la première cause de discrimination à l'embauche, et à l'absence de promotion sociale. C'est un domaine où il n'y a pas de chiffres, difficile de savoir quel est l'impact réel. Pourtant on ne peut pas dire que rien n'est fait. Des mécanismes sont mis en place : CV anonyme pour accéder à un premier entretien d'embauche, des chartes et des labels diversités au sein des entreprises sont élaborés mais cela reste insuffisant. Aujourd'hui 38% des descendants d'immigrés sont diplômés du supérieur, contre 33% pour leur parent. Malgré cela, ces diplômés ne sont pas mieux lotis. Ces derniers accèdent difficilement aux emplois les plus qualifiés.