Quelque 230 accords ont été signés entre fin 2009 et octobre 2010, mais les textes qui comportent un « engagement précis de la direction » sont minoritaires. Pourtant, Hervé Lanouzière, conseiller à la direction générale du travail, se réjouit d'un changement des mentalités : « Nous avons le sentiment qu’une vraie dynamique s’est installée dans les entreprises. Il y a une prise de conscience. On n’est plus dans le déni, les gens cherchent maintenant des solutions. »
Plan d’urgence sans contrainte légale
Le « plan d'urgence » incitant les entreprises à se saisir des problèmes du stress a été lancé par l'ancien ministre de Travail Xavier Darcos fin 2009. Mais ce plan ne comporte pas de contrainte légale, déplore Jean-Claude Delgenes, directeur général du cabinet de conseil Technologia : « Le problème c’est : comment faire avec des entreprises qui ne veulent pas mettre l’humain au centre des processus de décision. Qu’est-ce qu’on peut faire ? Est-ce qu’on veut légiférer ou pas ? ».
Pas de sortie de crise chez France Télécom
Si le stress est omniprésent dans le monde du travail, il est exacerbé dans certaines entreprises. France Télécom ne semble pas sortie de la crise, déclenchée par un plan de redressement et des méthodes de management violentes. Au moins 58 suicides au cours des trois dernières années, dont un encore ce mardi : un homme s’est immolé par le feu sur un parking de l’entreprise.
Pourtant, France Télécom travaille sur la prévention des risques psycho-sociaux, souligne Pierre Morville, délégué central du syndicat des cadres CFE-CGC et de l'UNSA : « Il y a eu ce vaste champ de négociations qui a significativement fait progresser le débat sur la question du stress au travail et des malaises au travail. Des mesures très concrètes ont été prises par le PDG de France Télécom, Stéphane Richard. D’abord la fin des mobilités forcées, qui étaient un facteur de stress important ! On demandait aux gens de changer de vie ou de changer de métier de façon incessante. Ensuite, la fin des fermetures des sites qui accompagnaient ces mobilités forcées. Et enfin, la reprise de l’embauche. Ce sont des mesures essentielles qui ont contribué à redonner confiance aux salariés après cette grave crise sociale. »
Moins de pression sur les salariés
Nabyl Beldjoudi, délégué FO à France Télécom-Orange, concède lui aussi, que l'entreprise a fait du chemin : « Il y a moins de pression sur les salariés, le système jadis "infernal" est en voie de normalisation. Mais il manque une large réflexion au niveau national pour mettre en œuvre la prévention du stress. Les managers sur le terrain n’ont pas le temps de s’en occuper. Aujourd’hui il faut vendre, il faut une qualité de prestation et ça prend 100% de leur temps.»
Et le délégué de continuer :« La prévention du stress, ça demande des réflexions qui ne sont pas anodines. Il faut avoir l’habitude de traiter ce genre de cas, il faut faire des expérimentations. S’il n’y a pas de plan de prévention national, c’est-à-dire des gens dans l’entreprise qui travaillent sur ce sujet, qui mettent au point en fonction des métiers dans l’entreprise les éléments d’une prévention des risques, ça n’évoluera pas. »
Dans son analyse Nabyl Beldjoudi rejoint le constat du ministère de Travail : pour arrêter le stress, il faut ouvrir un vaste chantier, dans lequel tous les partenaires sociaux et instances collaboreraient.