Gabino Rodriguez a découvert Année bisseXtile, film de Michael Rowe et Caméra d’or à Cannes en 2010, à Rennes. La taille de la mégalopole mexicaine, Mexico, 20 millions de personnes rend les contacts compliqués : « On sait qui sont les gens, on se salue mais passer autant de temps avec eux, c’est difficile et c’est ce qui a été possible ici ». Ces trois jours de rencontres à Travelling avec les autres cinéastes ont permis des échanges approfondis et des contacts plus personnalisés : « nous en riions nous-mêmes : mais comment est-ce possible de se connaître seulement ici, de voir nos films ici ? ».
Une nouvelle génération d’artistes
Gabino Rodriguez est très représentatif d’une nouvelle génération d’artistes qui nourrissent de leurs interrogations, et des nouvelles manières de travailler qui en découlent, le cinéma et le théâtre mexicains. « Je suis optimiste quand à l’avenir du cinéma mexicain. Le Mexique est un paradis pour le cinéma » déclare-t-il. Le cinéma est un art populaire au Mexique depuis les années vingt et les grands mélodrames de l’âge d’or du cinéma mexicain sont encore dans tous les esprits. »
Le Mexique produit beaucoup de films, certains avec de tous petits budgets, d’autres avec des financements plus importants. Ainsi Gabino Rodriguez a beaucoup travaillé ces deux dernières années. Il était au générique notamment du film Sin nombre (2009), de Cary Fukunaga, qui a mobilisé des moyens techniques et financiers importants. Le film raconte l’histoire d’émigrants centraux-américains qui tentent de passer aux Etats-Unis ; l’un d’eux fuit une bande de maras, jeunes délinquants hyper violents dont l’un d’entre eux est interprété par Gabino. Il a également collaboré avec d’autres réalisateurs de la même génération que lui comme Nicolas Pereda ou Rubèn Imaz dont les films, présentés aussi au festival, mobilisent des budgets beaucoup moins importants.
Gabino et Nicolas
Gabino Rodriguez et Nicolas Pereda, amis et complices de cinéma -proches depuis six ans et déjà cinq films ensemble-, travaillent depuis plusieurs années sur un cycle de longs métrages racontant la vie d’un petit groupe de personnages. Gabino est au cœur de cette tribu d’acteurs, toujours les mêmes, et lui-même joue son propre personnage dans la vie. Une histoire «à la Simpson » raconte-t-il en riant, sauf qu’il n’y a pas d’épisodes et que l’on peut voir les films indépendamment les uns des autres. Dans ces longs métrages, dont deux étaient présentés au festival : Juntos et Perpetuum Mobile, le réalisateur et son équipe de comédiens brossent ce qui pourrait apparaître comme des chroniques de la vie ordinaire de gens ordinaires mais les frontières entre fiction et réalité sont subtilement brouillées.
Le propos n’est pas de faire du « cinéma expérimental » mais de questionner la narration cinématographique, de trouver un autre point de vue pour raconter la vie. Il s’agit de sortir des sentiers battus de la narration, du schéma classique – qui fit les riches heures du cinéma mexicain de l’âge d’or- dans lequel le bien et le mal s’affrontent, parce que « notre vie se construit bien davantage de quotidienneté que de drames. Et elle est beaucoup moins spectaculaire que ce que nous le souhaiterions ! ». Ni fables sociales, ni chroniques intimes, ces films donnent à voir et racontent une ville, Mexico, et ses habitants, aux antipodes des clichés habituels.