RFI : Il y aura un hommage national rendu en avril au Panthéon à Aimé Césaire. Cette plaque, portant le nom d’Aimé Césaire, scellée au Panthéon, que symbolise-t-elle pour vous ?
Georges Desportes : A mon avis, c’est une reconnaissance nationale de la part du Président de la République. C’est à son initiative. Grâce à lui cela peut se faire. A condition aussi que la famille dise oui à cet événement. Césaire lui-même et sa famille, au départ, n’ont pas voulu qu’il soit enterré au Panthéon. On voulait le garder sur la terre martiniquaise. Césaire lui-même ne serait pas très d’accord. Il est au cimetière de Fort-de-France, qu’il a créé lui-même, et il y a un poème marqué sur le fronton de sa tombe.
RFI : Quel héritage d’Aimé Césaire entre au Panthéon avec cette plaque?
G.D. : Etant donné que nous sommes aussi français que martiniquais, le fait d’avoir la mémoire visible d’un côté comme de l’autre, c’est une bonne chose, puisque lui il avait toujours dit qu’il est aussi bien l’un que l’autre. Pendant toute son œuvre, c’est le français qui était sa langue principale.
RFI : La décision du Président français d’offrir à Aimé Césaire un hommage national, est-ce qu’il s’agit d’un hommage au poète et écrivain ou plutôt d’un geste politique de la part de Nicolas Sarkozy ?
G.D. : Les deux peuvent se mélanger aisément. C’est une question de goût, d’habilité et de langage. Mais l’un n’empêche pas l’autre. On peut très bien avec n’importe quelle philosophie décider que c’est politique ou pas.
RFI : C’est aussi le concept de la « négritude » cher à Aimé Césaire qu’on va faire entrer au Panthéon ?
G.D. : Pourquoi pas. Il ne faut pas diviser à l’infini la question de l’identité martiniquaise et de l’identité française. Nous sommes les personnes que nous sommes. Il ne faut pas d’une façon cartésienne décider de faire une division, de faire un trait avec ce qui est d’un côté et ce qui est de l’autre côté, parce que le métissage des gens démontre qu’il y a une unité. Le métis, s’il est né du blanc, il est du noir. Il est ni l’un, ni l’autre, mais il est aussi l’un et l’autre, mais dans un être nouveau. Je crois qu’il faut avoir un regard équilibré, plutôt non pas une raison, mais une galaxie pour bien saisir les nuances et ne pas décider de couper les choses, saucissonner les choses d’une façon arbitraire.
L’hommage au Panthéon, c’est un acte national, cela a une portée absolument universelle. C’est un acte qui permet non plus de diviser, c’est cela que je crois comprendre politiquement, pour faire étalage pour cette vérité. La France est aussi bien d’un côté à la Martinique que la Martinique est de l’autre côté en France.
RFI : L’hommage national change-t-il l’image ou l’importance d’Aimé Césaire en France ?
G.D. : Pour les Français, oui. Pour la nation française, oui. Parce que la conscience retarde sur la question de l’égalité des races, l’égalité des hommes. Cela peut être un lien plus fort pour permettre la conscience de tout le monde – aussi bien de la Martinique que de la France et du côté aussi de l’Europe – découvrir qu’il faut poser un autre regard sur l’homme. Ce n’est pas sa couleur, ce n’est pas son métier, ce n’est pas des tas de petites choses qui pourront définir ce que la vie-même propose dans son évolution normale.
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