Avec notre envoyé spécial à Sébastopol, Sébastien Gobert
Est-ce une occupation ou une invasion ? Y a-t-il de la résistance ou une débandade ? Des affrontements ou des négociations ? La situation semble plus confuse que jamais dans la péninsule de Crimée. Entre les annonces contradictoires, il semble néanmoins évident que les troupes russes progressent dans leur prise de contrôle des points stratégiques de la région. Au moins trois bureaux des gardes-frontières ukrainiens sont tombés aux mains des forces russes, de même que plusieurs installations militaires de différentes sortes.
Les tensions sont particulièrement fortes à l'est de la péninsule, aux abords du détroit de Kerch. Là, un petit bras de mer d'à peine 2 km sépare la côte de Crimée de la côte russe. L'endroit est donc d'une importance vitale pour l'armée russe, dans l'éventualité d'une invasion terrestre prochaine. Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev a signé un décret pour construire à grande vitesse un pont au-dessus du détroit, une décision qu'il n'a pas discuté avec son homologue ukrainien. Les perspectives d'une invasion à grande échelle restent incertaines, mais il est déjà bien clair que le territoire de la Crimée ne fait plus tout à fait partie de l'Ukraine, Etat souverain.
- Intense activité diplomatique
Réunis à Bruxelles, les ministres européens des Affaires étrangères ont décidé de suspendre les pourparlers avec la Russie sur les questions relatives aux visas. La Russie est du « mauvais côté de l'histoire » en Ukraine, a estimé ce lundi Barack Obama qui a dénoncé une violation par Moscou du droit international et de la souveraineté de Kiev. Le gouvernement américain examine une série de sanctions économiques et diplomatiques visant à isoler Moscou, qui a été prévenu, a ajouté le président des Etats-Unis, qui s'adressait à la presse à l'issue d'un entretien à la Maison Blanche avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.
Jean Asselborn, le chef de la diplomatie luxembourgeoise qui préside le Conseil de sécurité de l'ONU s'est exprimé à Bruxelles à l'issue de la réunion des 28 ministres des Affaires étrangères. Il craint un scénario à la Géorgienne. En 2008, les Russes avaient également demandé la convocation du Conseil de sécurité. « Le lendemain, ils avaient envahi l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie », s'inquiète Jean Asselborn.
Barack Obama a invité son homologue Vladimir Poutine à accepter l'envoi d'observateurs internationaux pour parvenir à un accord acceptable pour tous les Ukrainiens. L'Organisation pour la sécurité et la coopération (OSCE) cherche à mettre sur pied un groupe de contact international pour tenter de régler la crise. La chancelière allemande Angela Merkel aurait convaincu Vladimir Poutine d'accepter cette idée.
Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a appelé les Occidentaux à laisser de côté leurs « calculs géopolitiques » et à penser avant tout au peuple ukrainien.
Il a estimé que toutes les parties devraient s'en tenir à l'accord du 21 février signé par Viktor Ianoukovitch et les représentants de ce qui était alors l'opposition ukrainienne. Ce texte, négocié par la troïka franco-germano-polonaise de l'Union européenne, prévoyait la mise en place d'un gouvernement d'union nationale, la tenue d'une élection présidentielle anticipée et une réforme de la Constitution rééquilibrant les pouvoirs entre la présidence et le Parlement.
RFI