Ukraine: Moscou «assez sceptique» au sujet d'une relance des relations

Ce sera certainement l'un des plus gros défis pour le nouveau président ukrainien : la guerre avec la Russie dure depuis cinq ans dans l'est du pays. L'intégrité territoriale ukrainienne a été mise à mal par Moscou, avec l'annexion de la Crimée et les tentatives séparatistes du Donbass. Comment a réagi Moscou ce lundi 22 avril, au lendemain de l'élection de Volodymyr Zelenskiy ?

Avec notre correspondant à Moscou,  Daniel Vallot

La première réaction officielle est venue du Premier ministre russe Dmitri Medvedev. Il y a une chance d’amélioration de notre relation avec l’Ukraine, écrit notamment le chef du gouvernement russe sur les réseaux sociaux. Il reste néanmoins prudent, et affirme ne pas avoir d'illusions à propos du nouveau président ukrainien.

« Il est trop tôt pour parler de félicitations de la part du président Poutine à monsieur Zelenskiy, mais aussi de la possibilité d'un travail commun. Nous pourrons discuter uniquement de cas concrets. En même temps, Moscou respecte le choix du peuple ukrainien, d'autant plus que ce choix est très clair. Nous pouvons aussi ajouter que, globalement, la légitimité de ces élections pose question, puisque 3 millions de citoyens ukrainiens qui vivent en Russie n'ont pas eu la possibilité de voter », a déclaré Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin.

Réaction prudente de Moscou, donc. Il faut dire que les autorités russes ne savent pas vraiment à quoi s’attendre avec Volodymyr Zelenskiy. Le Kremlin espérait, c'est une certitude, une défaite de Petro Porochenko, le président sortant, considéré ici à Moscou comme un président « va-t-en-guerre », pro-Otan et foncièrement hostile à la Russie.

Mais le flou entretenu par Zelenskiy sur son programme, son absence d’expérience politique et son profil atypique sont autant de points d’interrogation pour les autorités russes, qui ne savent donc pas encore vraiment sur quel pied danser avec ce nouveau chef d'État chez leur voisin ukrainien, ce qui pourrait gêner également le Kremlin.

C’est l’image d'un président jeune, affirmant lutter contre la corruption. Un président qui plus est élu, à l’issue d’une campagne électorale haletante, ce que n’a pas manqué de souligner ce lundi matin l’opposant russe Alexeï Navalny, qui a félicité les Ukrainiens pour un scrutin équitable - chose rare, souligne l’opposant, dans un pays de l’ex-Union soviétique.


■ Galia Ackerman, cheffe du bureau russe de la revue Politique internationale

Elle publie en mai prochain Le Régiment immortel : La guerre sacrée de Poutine, aux éditions Premier Parallèle.

RFI : En attendant les législatives, l'Ukraine plonge dans l'inconnu avec son nouveau président. L'ancien humoriste Volodymyr Zelenskiy a largement battu le chef de l'État sortant, le pro-européen Petro Porochenko, qui estime que la victoire de son jeune adversaire est aussi celle du Kremlin. Volodymyr Zelenskiy a promis dès dimanche soir de relancer le dialogue avec Moscou. À quoi peut-on s’attendre dans les prochains mois ?

Galia Ackerman : Moscou est assez sceptique sur cette relance. Et dans les « talk-shows » politiques, il y a encore plus de liberté puisqu'il s'agit là, même, de ne pas reconnaître les résultats de l'élection.

Quant à Zelenskiy lui-même, il a promis qu’il allait s’attacher dès le début de sa présidence au dossier de la libération des marins ukrainiens arrêtés dans le détroit de Kertch par les troupes russes et qui attendent à Moscou leur procès.

S’il réussit, ce sera déjà un signe très important d’un possible réchauffement dans les relations entre l'Ukraine et la Russie. Mais personnellement, je ne pense pas qu’il puisse le réussir.

Quels sont, d’après vous, les autres grands défis qui attendent maintenant Volodymyr Zelenskiy ?

Volodymyr Zelenskiy s’est fait sa réputation sur la lutte contre la corruption. Il est un « showman », qui tient un show comique extrêmement populaire, et qui s’appelle « Le serviteur du peuple ». Il joue le rôle du président.

C'est ainsi qu’il est devenu populaire. Donc je pense que naturellement, il doit s’attaquer à la corruption qui est flagrante en Ukraine, malgré un certain nombre de mesures qui ont déjà été prises sous Porochenko.

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