Brexit: les leaders de l'UE réunis pour accorder leurs violons sur le report

Les 28 chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne sont réunis ce mercredi soir à Bruxelles pour un sommet extraordinaire sur le Brexit, deux jours avant l'expiration du délai supplémentaire accordé à Londres. Les 27 semblent globalement ouverts à l’idée d’un report, mais tous ne le conçoivent pas de la même façon.

Pour les 27, la perspective d’un nouveau report semble désormais faire consensus, toute la question est maintenant de savoir combien de temps et sous quelles conditions, analyse notre correspondant à Bruxelles, Pierre Benazet . La durée du report semble partie pour ne pas correspondre exactement à la date du 30 juin que demande Theresa May puisqu’on a, chez les 27, deux thèses qui doivent encore être conciliées.

Il y a d’un côté ceux qui, comme l’Autriche ou la France, sont plutôt a priori favorables à un report de courte durée - mais cette position est évidemment susceptible d’évoluer - et il y a ceux qui estiment comme Angela Merkel ou comme Donald Tusk que Theresa May n’arrivera pas à décrocher rapidement un vote à la Chambre des communes.

La chancelière allemande parle de 2020, le Premier ministre néerlandais évoque la fin 2019, mais ce qui est certain c’est que tous veulent éviter que le maintien du Royaume-Uni dans l’UE menace le fonctionnement de l’Union comme l’a répété à son arrivée Emmanuel Macron.

« Nous avons un projet européen, ça fait 34 mois que le référendum britannique s'est tenu, et la clé pour nous est que le projet européen soit maintenu dans sa cohérence et qu'il puisse se poursuivre », a déclaré le président français. Même si « nous avons réussi à faire avancer des projets », « la viabilité et l'unité du projet européen sont encore en jeu ». Il est donc « indispensable que rien ne compromette le projet européen dans les mois à venir », selon lui, car « nous avons une renaissance européenne à reconduire ». « Je ne souhaite pas que le projet du Brexit vienne nous bloquer », a-t-il lancé. « A ce stade, à mes yeux, rien n'est acquis ».

Parmi les conditions évoquées à Bruxelles pour ce report, personne ne veut par exemple que l’accord de sortie puisse être renégocié, mais certains Européens voudraient aussi que le Royaume-Uni renonce à son veto pour des décisions qui ne concernent que les 27 comme par exemple le budget futur de l’UE ou les nominations des présidents de la Commission ou du Conseil européens.

May les mains vides

De son côté, Theresa May s’est présentée devant les 27 dans une position extrêmement inconfortable. Le bloc européen voulait qu’elle revienne à Bruxelles demander une nouvelle extension avec une proposition très claire pour la suite. Or la Première ministre arrive les mains vides : elle n’a trouvé aucun plan B à son accord de retrait rejeté trois fois par le Parlement britannique.

Elle vient à Bruxelles plaider pour un report court du Brexit jusqu’au 30 juin dans l’espoir d’avoir trouvé d’ici là avec l’opposition travailliste un accord acceptable par les députés. Mais ces discussions avec le Labour qui doivent reprendre ce jeudi ne donnent rien pour l’instant, rappelle notre correspondante à Londres, Muriel Delcroix.

Si elles échouent, il lui reste l’option de nouveaux votes indicatifs au Parlement ou bien celle de tenter encore une fois de faire accepter son accord par des rebelles brexiters qui préfèreront céder plutôt que de voir le Royaume-Uni obligé de participer aux élections européennes fin mai.

Car cette perspective provoque beaucoup de colère à Londres : le comité 1922, un groupe très influent de députés conservateurs sans portefeuille se réunit ce soir avec en tête une date ferme pour le départ prochain de Theresa May.

La question de sa démission est d’autant plus brûlante que la dirigeante avait déclaré il y a quelques jours ne pas être prête en tant que Première ministre à accepter un report du Brexit au-delà du 30 juin. Or tout porte à croire que l’UE penchera pour une extension plus longue, jusqu’à un an avec certaines conditions. Il va être intéressant de voir comment Theresa May se sort de ce piège qu’elle s’est elle-même tendu.

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