Deux courbes croissantes résument le rapport publié ce jeudi par Amnesty International : l’augmentation du nombre de morts civils en Afghanistan et la multiplication par les Européens des renvois forcés dans le pays. « Les renvois se font à Kaboul » puisque, explique Jean-François Dubost, d'Amnesty France, « des pays comme le Royaume-Uni ou la Norvège, considèrent que Kaboul est une zone sûre ».
Sauf qu’il n’en est rien. « Kaboul n’est pas une zone sûre. Kaboul concentre à peu près 20 % des dommages causés aux civils ». D’ailleurs, rappelle l’humanitaire, « les officiels afghans considèrent même que leur pays, dans son intégralité, n’est pas sûr ».
« Considérations élémentaires d'humanité »
Jean-François Dubost se désole de voir que « depuis à peu près 2015 » et l’arrivée sur le territoire de l’Union européenne d’environ « 1 million de personnes, dont à peu près 20% d’Afghans, les Etats ont tourné le dos à leurs principes, aux règles de droit, à des considérations élémentaires d’humanité, de [protection] de la vie humaine ».
Afghan, Fahrad Sediqi vit en France où il attend le résultat de sa demande d’asile. Paris a tenté trois fois de le renvoyer en Afghanistan. A chaque fois il a résisté. Il témoigne : « Les talibans ont volé nos terres, nos maisons dans notre village. Nous sommes partis à Kaboul. J'ai participé à une manifestation contre notre gouvernement et contre les talibans. Ils ont appelé mon père : tu laisses ton fils élever la voix contre nous, nous allons le tuer. Ensuite j'ai participé à une commission électorale, pour qu’on puisse choisir un bon président pour notre pays. Ils ont dit à mon père : tu laisses ton fils travailler avec des chrétiens. Là ils ont tenté de me tuer. J’ai été blessé aux mains, à la tête, au visage. Mon père a dit : "tu quittes le pays" ».
Entre 2015 et 2016, le nombre de demandeurs d'asile renvoyés en Afghanistan par les Européens est passé de 3 000 à 9 000 personnes.