Russie: un mufti russe plaisante sur l'excision, tollé sur les réseaux sociaux

L’excision est un problème qui ne touche pas seulement l’Afrique. En Russie, dans le Caucase, des milliers de petites filles subissent cette mutilation génitale. La pratique est répandue dans les communautés des montagnes au Daguestan, selon un rapport de l’organisation « Initiative pour la justice », publié le 15 août. Un dignitaire musulman du Caucase a réagi à ce rapport en souhaitant l'excision pour toutes les femmes. Les réseaux sociaux ont vivement réagi.

De notre correspondante à Moscou, Jeanne Cavelier

Une polémique a éclaté sur les réseaux sociaux en Russie après l’intervention d’un leader religieux, le président du Centre de coordination des musulmans du Caucase du Nord sur la pratique de l'excision. Ismaïl Berdiev s’est exprimé le jour de la sortie du rapport sur les ondes de Govorit Moskva. 

Eliminer la « débauche sur terre »

Pour le mufti, rien dans l’islam ne condamne l’excision :
- « Dites-moi, à quoi cela sert au juste ? »
- « De ce que j’en sais, c’est pour calmer un peu l’ardeur des femmes, seulement pour ça. Et cela ne nuit absolument pas à la santé ».

Deux jours plus tard, le mufti explique qu’il « faudrait exciser toutes les femmes », un moyen selon lui d’éliminer la « débauche sur terre ». Sur Internet, les commentaires fusent. Outrés, parfois sarcastiques ou violents: « Il faudrait couper les parties du mufti et lui fourrer dans la bouche », s’emporte Evguenia. « Ce serait peut-être plus simple de le castrer », poste Ilya sur Vkontakte, le Facebook russe. Pour Tatiana, sur Twitter, c’est une « barbarie médiévale ». « Un cas d’obscurantisme isolé », pour Maga Rso.

L'excision au Daguestan

Devant le tollé, et les critiques des autres responsables musulmans en Russie, Ismaïl Berdiev se rétracte : on l’a mal compris, « c’était une plaisanterie ». Quel était alors le sens de ses propos ? Eh bien, simplement, qu’il faut trouver une solution au problème de la sexualité soi-disant débridée de la femme. Parce que, selon lui, Dieu l’a créée pour donner naissance à des enfants et pour les élever. Sur ce point, il reçoit un soutien inattendu sur Facebook : un prêtre orthodoxe controversé, Vsevolod Chapline, appelle à « respecter les traditions des peuples voisins » et à revenir d’ailleurs à la morale du 19e siècle. Le féminisme du XXe siècle est un mensonge, écrit-il sur le réseau social.

Appel au dialogue avec les autorités religieuses

Finalement, la polémique a donné un écho inattendu au rapport dénonçant la pratique de l’excision. « Le Conseil présidentiel pour les droits de l’homme a montré un intérêt. J’espère vraiment qu’ils nous aideront par la suite à travailler sur des initiatives », explique l’une des auteurs, Youlia Antonova, au micro de Govorit Moskva. Le président de ce conseil, Alexandre Brod, s’est dit prêt à discuter du problème avec les représentants religieux et politiques du Daguestan.

Partager :