De notre correspondante à Moscou, Jeanne Cavelier
Une polémique a éclaté sur les réseaux sociaux en Russie après l’intervention d’un leader religieux, le président du Centre de coordination des musulmans du Caucase du Nord sur la pratique de l'excision. Ismaïl Berdiev s’est exprimé le jour de la sortie du rapport sur les ondes de Govorit Moskva.
Eliminer la « débauche sur terre »
Pour le mufti, rien dans l’islam ne condamne l’excision :
- « Dites-moi, à quoi cela sert au juste ? »
- « De ce que j’en sais, c’est pour calmer un peu l’ardeur des femmes, seulement pour ça. Et cela ne nuit absolument pas à la santé ».
Deux jours plus tard, le mufti explique qu’il « faudrait exciser toutes les femmes », un moyen selon lui d’éliminer la « débauche sur terre ». Sur Internet, les commentaires fusent. Outrés, parfois sarcastiques ou violents: « Il faudrait couper les parties du mufti et lui fourrer dans la bouche », s’emporte Evguenia. « Ce serait peut-être plus simple de le castrer », poste Ilya sur Vkontakte, le Facebook russe. Pour Tatiana, sur Twitter, c’est une « barbarie médiévale ». « Un cas d’obscurantisme isolé », pour Maga Rso.
L'excision au Daguestan
Devant le tollé, et les critiques des autres responsables musulmans en Russie, Ismaïl Berdiev se rétracte : on l’a mal compris, « c’était une plaisanterie ». Quel était alors le sens de ses propos ? Eh bien, simplement, qu’il faut trouver une solution au problème de la sexualité soi-disant débridée de la femme. Parce que, selon lui, Dieu l’a créée pour donner naissance à des enfants et pour les élever. Sur ce point, il reçoit un soutien inattendu sur Facebook : un prêtre orthodoxe controversé, Vsevolod Chapline, appelle à « respecter les traditions des peuples voisins » et à revenir d’ailleurs à la morale du 19e siècle. Le féminisme du XXe siècle est un mensonge, écrit-il sur le réseau social.
Appel au dialogue avec les autorités religieuses
Finalement, la polémique a donné un écho inattendu au rapport dénonçant la pratique de l’excision. « Le Conseil présidentiel pour les droits de l’homme a montré un intérêt. J’espère vraiment qu’ils nous aideront par la suite à travailler sur des initiatives », explique l’une des auteurs, Youlia Antonova, au micro de Govorit Moskva. Le président de ce conseil, Alexandre Brod, s’est dit prêt à discuter du problème avec les représentants religieux et politiques du Daguestan.