Les quatre forces en question sont : le Parti populaire (conservateur, au pouvoir depuis 2011), le Parti socialiste PSOE, le mouvement de gauche Podemos, et le parti libéral centriste Ciudadanos. Les partis entrent de nouveau en campagne électorale, mais, selon tous les pronostics, avec très peu de chances d’aboutir cette fois à un résultat permettant de construire une nette majorité parlementaire.
Un gouvernement minoritaire ?
Les sondages annoncent un rapport de forces très semblable à celui révélé par les législatives de décembre. Pour Barbara Loyer, directrice de l’Institut français de géopolitique à l’Université Paris 8, beaucoup dépend du taux d’abstention, mais aussi « des nouvelles alliances qui pourraient être faites ». L’une des questions clés est de savoir si le PSOE et/ou Podemos pourraient s’abstenir lors du vote au nouveau Parlement et laisser ainsi le Parti populaire créer un gouvernement minoritaire, solution la plus simple si une coalition gouvernementale stable restait toujours introuvable.
Barbara Loyer fait également allusion aux derniers sondages qui relèguent le Parti socialiste à la troisième place, ce qui serait un vrai bouleversement de la scène politique, mais qui « ne changerait pas grand-chose » par rapport à la recherche d’une majorité gouvernementale viable.
Cela dit, ce résultat de sondages précis constitue la plus grande surprise de cette campagne électorale. Surprise due au mouvement Podemos qui en s’alliant avec le petit parti d’extrême gauche Izquierda Unida sous le sigle Unidos Podemos (« Unis, nous pouvons ») a réussi à devancer les socialistes dans les prévisions électorales.
Vers un éclatement du parti socialiste ?
Pour Bernard Vincent, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, si ce résultat se confirmait à l’issue du scrutin du 26 juin, il pourrait même mener à l’éclatement du PSOE, première force de gauche en Espagne depuis des décennies. « Nous sommes vraiment devant une grande inconnue », explique-t-il. « La formation Podemos cherche par tous les moyens possibles à devancer le PSOE, de manière à être la première force de gauche en Espagne. Mais dans ces conditions, si tel devait être le cas, il sera extrêmement difficile de parvenir à un accord entre Podemos et le PSOE. Donc, on ne voit pas très bien ce qui pourrait sortir de cette nouvelle configuration. Cela peut provoquer un éclatement du PSOE, c’est l’une des hypothèses possibles. »
Mais les Espagnols ne sont pas encore au stade de prendre les décisions de ce genre. La campagne électorale vient seulement de commencer. Il est peut-être un peu tôt pour dire quels seront ses principaux thèmes. En tout cas, l’ancien président du Parlement européen et membre du Parti socialiste, Enrique Baron Crespo, fait une nette distinction entre les problèmes qui risquent de passionner la classe politique, et ceux qui sont vraiment importants pour l’avenir du pays.
L’essentiel et le secondaire
Il faut, dit-il, « répondre aux problèmes du pays, aux défis que nous avons. Et un défi essentiel, c’est la création d’emploi et la sortie de la crise au moment où l’économie commence à reprendre. Et surtout, à mon avis, l’investissement en éducation et en recherche, qui a beaucoup souffert et qui est la garantie de notre futur. Je crois qu’il faut se concentrer sur ces questions-là ».
L’ancien président du Parlement européen craint toutefois de voir la classe politique se concentrer sur des problèmes bien différents. « Pour le Parti populaire, la question c’est de rester au gouvernement à n’importe quel prix. Pour Podemos, c’est dépasser le parti socialiste. Mais, vraiment, ce ne sont pas les questions essentielles. »
Outre une épreuve de force entre différents courants politiques, la campagne risque donc d’en être une également entre ce qui est essentiel pour le pays et ce qui ne l’est pas.